LA PLACE DE LE POST-TONIQUE DANS LOCTOSYLLABE
DE QUELQUES POÈTES
Gérald Purnelle
Centre Informatique de Philosophie et Lettres
Université de Liège
1b, Quai Roosevelt, B-4000 Liège
Abstract
This paper analyzes and compares octosyllabic verses by sixteen Belgian and French poets, ranging from Baudelaire and Hugo to Éluard and Perros, with a special emphasis on post-stress e's at the various places this vowel can occupy. Even and odd syllables are confronted to determine whether some poets strive for, or avoid, an iambic scansion of their octosyllables. The study shows that six poets diverge significantly from the rest of the corpus, three of them through an especially high number of e's in even syllables, the others through a deficit at that same place and an overabundance at the 5th syllable. These observations allow us to distinguish between those poets who were able to perceive and design the octosyllable as a unit from those who, in order to compose it, needed to give it a binary rhythm or to allow for a median pause.
1. Introduction
Loctosyllabe occupe une place particulière parmi les vers auxquels recourt la métrique française régulière. Il constitue en effet le plus long vers simple, cest-à-dire non complexe. Un vers complexe, tels le décasyllabe ou lalexandrin, se compose de deux sous-mesures de longueur fixe associées (généralement 4 et 6 pour lun, 6 et 6 pour lautre) ; à linverse, un vers simple se définit par la seule propriété dun certain nombre fixe de voyelles. Benoît de Cornulier a expliqué pourquoi 8 syllabes sont un seuil au-delà duquel un vers est nécessaire-ment complexe, cest-à-dire subdivisé et partagé par une césure : "En français, au-delà de huit, le nombre syllabique exact est inaccessible à la perception." Il montre que tout lecteur de vers est plus ou moins apte à percevoir, à la lecture ou à laudition, lisosyllabisme des vers dun poème, et que cette capacité décroît à proportion de la longueur des vers impliqués, avec une limite dont la place varie dun individu à lautre, mais qui, dune manière générale, exclut chez la plupart cette capacité perceptive au-delà de 8 syllabes.
Loctosyllabe ne présente donc aucune coupe, aucune césure : il doit être lu dun bloc, sans aucune marque de position fixe permettant de fractionner cette perception. Néanmoins, le lecteur, quil lise mentalement ou oralement, doit percevoir sans erreur ni hésitation la longueur de chacun des octosyllabes dun poème, afin de reconnaître à la fois leur identité métrique et le rythme du poème.
Quon me permette ici dévoquer mon expérience personnelle de lecteur : quand il sagit de lire des heptasyllabes ou des octosyllabes, jaccompagne (mentalement ou oralement) cette lecture dun rythme respectivement trochaïque ou iambique, en frappant une voyelle sur deux dun ictus ; je commence à la première syllabe du vers sil sagit dun heptasyllabe, à la seconde pour loctosyllabe : soit les rythmes '''' et '''' ; en dernière analyse, la nécessité de commencer en 1 pour un vers impair et en 2 pour un pair en imprimant à un vers un rythme binaire découle de laccentuation de la langue française, en raison de laquelle la dernière syllabe porte toujours un accent verbal (ou syntaxique). Je ne prône pas cette scansion : elle mest utile et familière, simplement.
Je rythme donc loctosyllabe en y distinguant 4 segments disyllabiques ; ceci, je le reconnais, se fait, la plupart du temps, à lencontre de la véritable accentuation verbale du vers qui, elle, nintervient en rien dans le rythme, la structure ou la constitution du vers (si ce nest en dernière syllabe), à linverse des vers complexes, dont le rythme supérieur est déterminé par deux accents verbaux ou syntaxiques. Je frappe donc dun ictus toute syllabe paire, que lui corresponde ou non un accent verbal. Peu importe, dès lors quil sagit de marquer un rythme auquel les frontières de mots ne participent pas, daccentuer une syllabe interne ou initiale de mot ; il nest pas choquant daccentuer ainsi la première syllabe de soulever dans Pour soulever un poids si lourd. Cette pratique ne me pose problème que dans un cas : il me paraît gênant, en lisant de la sorte, de faire porter un ictus par une voyelle féminine, cest-à-dire par un e atone formant une syllabe finale de mot, située à la suite dun accent verbal ; exemple : Hyperbole ! de ma mémoire. À linverse, rien ne soppose à frapper toute voyelle masculine, y compris les autres e atones, quils soient internes (fenêtre) ou figurent dans des monosyllabes proclitiques (ce de je le me ne que se te).
2. Objet de létude et corpus
Mon but sera ici dexaminer loctosyllabe de différents poètes, afin de déterminer sil se prête plus ou moins à cette lecture rythmée et si linconvénient que jai dit est plus présent chez les uns et plus rares chez les autres. Au-delà de cette question, qui serait celle de léventuelle pertinence de ce rythme, il sagit de voir quels poètes y furent plus soumis ou plus sensibles que dautres ; en dautres termes, ce rythme a-t-il des chances de leur avoir été présent à lesprit au moment de la composition ?
Les principaux paramètres de létude seront donc : la nature féminine ou masculine des syllabes de tous les octosyllabes observés ; la position (paire ou impaire) des e féminins dans le vers.
Il existe un autre paramètre, dont létude aurait pu sadjoindre à celle du e post-tonique : quand un accent verbal en syllabe finale, non suivi dune syllabe féminine, se situe à une position paire, cette coïncidence est propre à souligner un rythme iambique. Il va de soi que tout vers où ce phénomène apparaît sy prête mieux que ceux où, par exemple, un e post-tonique apparaît en syllabe paire. Quand cela se produit à la 4e syllabe, cela va même jusquà ménager au milieu du vers une sorte de césure locale (exemples : Pour soulever un poids si lourd ; Au seul souci de voyager). Si jai choisi de nétudier que la position de le post-tonique, en négligeant laccent verbal, qui eût constitué une meilleure marque de rythme, cest quil ne sagissait pas de montrer lexistence de telles marques ou dune césure virtuelle au milieu du vers chez certains poètes, mais de chercher sil existe chez eux des marques incompatibles avec un rythme binaire globalement indépendant des accents verbaux.
Jai choisi un ensemble de 16 poètes des xixe et xxe siècles, en cherchant la diversité et la possibilité de comparaisons pertinentes. Pour le xixe s. sont tout dabord étudiés quatre grands noms : Baudelaire, Hugo, Mallarmé et Verlaine. De Baudelaire sont relevés tous les octosyllabes des Fleurs du mal, tant dans les poèmes isosyllabiques quhétérosyllabiques ; De Hugo, un seul recueil, volumineux et particulièrement abondant en octosyllabes, Les Chansons des rues et des bois ; de Mallarmé, deux ensembles : les octosyllabes des Poésies et ceux des Vers de circonstance, publiés posthumément ; de Verlaine, tous les grands recueils jusquen 1889 (Parallèlement). Sajoutent à ces quatre noms Maeterlinck, Roussel et Elskamp. Le premier est choisi pour plusieurs raisons : il est belge ; son uvre poétique est courte ; dans les Serres chaudes, tous les poèmes sont, sauf rares exceptions, composés soit en octosyllabes soit en vers libres. Raymond Roussel nest pas un poète capital (en tant que poète) ; ses vers ne brillent pas par leur art. Jai pourtant pris en compte son long poème isosyllabique LÂme de Victor Hugo, quil place fictivement sous la plume dHugo lui-même. Il sagira de voir si la fiction implique une imitation, du moins selon le critère qui sera envisagé ici. Enfin les premiers recueils dun autre poète belge également étudié, Max Elskamp, appartiennent au xixe siècle ; il a écrit des poèmes au style proche de celui de la chanson, en mètres majoritairement courts, dont beaucoup doctosyllabes ; sa poésie se distingue par une syntaxe et un "style" très particuliers ; sont utilisés plusieurs recueils de 1895 à 1924.
Au xxe siècle appartiennent également neuf autres poètes. Luvre dApollinaire est majoritairement classique quant à la forme métrique, mais elle a en même temps contribué à la fondation de la modernité, en se libérant progressivement du classicisme pur des débuts. Jai retenu les octosyllabes des seuls poèmes isosyllabiques, mais pris dans toute luvre, y compris dans les recueils publiés posthumément (la Chanson du mal-aimé est distinguée du reste du recueil Alcools). De Valéry sont repris tous les octosyllabes du recueil Charmes. Jules Romains a été choisi en raison de son style personnel, apparemment prosaïque, et susceptible de contraster avec dautres poètes. Sont comptés tous les octosyllabes de trois recueils, datés de 1908 à 1916. Sans doute sattendra-t-on à trouver Paul-Jean Toulet aux antipodes du style de Romains. De ce poète fin ciseleur, jai retenu tous les octosyllabes présents dans les trois premières sections de son unique recueil les Contrerimes organisé par Toulet mais publié posthumément (Contrerimes, Chansons et Dizains). Jai exclu les autres poèmes posthumes, quil avait écartés du recueil. À noter que les poèmes composés en contrerimes (la section la plus abondante) sont forcément hétérosyllabiques (composés en quatrains 8-6-8-6). Jean Pellerin est moins connu ; disciple de Toulet, il en a subi linfluence ; il est choisi à des fins de comparaison avec son maître et pour illustrer lécole fantaisiste. Je nai toutefois retenu de lui que le très long poème La Romance du retour, entièrement composé en octosyllabes et publié en 1921. Jules Supervielle a représenté à partir des années vingt une certaine modernité qui, peu avant la guerre, a commencé à évoluer vers plus de classicisme ; sont pris les poèmes isosyllabiques de cinq grands recueils. Sont également présents deux surréalistes venus à la métrique régulière pendant la guerre : Aragon et Éluard. Du premier jai retenu quatre recueils (de 1941 à 1964) ; dÉluard, tous les octosyllabes des poèmes ou séquences en vers blancs réguliers depuis les premiers recueils riches en poèmes isosyllabiques (1944) jusquà la fin de son uvre. Enfin, un poète plus récent, pour illustrer lépoque contemporaine : Georges Perros, dont tout un long recueil est écrit en octosyllabes blancs ; cette uvre produit à la lecture une forte impression de prosaïsme, mais avec une syntaxe parfois contrariée par des chevilles.
En annexe figure un tableau reprenant, pour chaque recueil et chaque poète, les titres, les dates de publication ou de rédaction, le nombre doctosyllabes examinés, le nombre de vers contenant au moins un e post-tonique, le nombre de syllabes présentant cette voyelle, les effectifs pour les syllabes 2 à 6.
3. La proportion des e post-toniques chez les 16 poètes
Avant daborder la question principale de cette étude, il convient dévaluer si lobjet dont on observera un trait (la position) est par ailleurs stable dans le corpus étudié.
Pour ce faire, on compare les poètes selon deux critères convergents : dune part le nombre de vers qui contiennent au moins un e ou qui en sont dépourvus, dautre part le compte des syllabes selon quelles présentent une voyelle masculine ou féminine (e post-tonique). Pour la deuxième évaluation, les 6 syllabes centrales, de 2 à 7, étant les seules susceptibles de contenir un e post-tonique, les première et dernière syllabes ne sont pas prises en compte dans les effectifs de voyelles.
Le pourcentage de vers contenant au moins un e est, pour tout le corpus, égale à 44,71 %. Les voyelles féminines occupent 8,7 % des six syllabes concernées. Dun poète à lautre, la proportion varie considérablement ; en partant du plus abondant en vers ou en syllabes de ce type, les poètes se classent comme suit :
% des vers avec e |
% des syllabes avec e |
|||||||
Valéry |
56,92 |
Baudelaire |
44,89 |
Valéry |
11,74 |
Baudelaire |
8,59 |
|
Maeterlinck |
54,59 |
Apollinaire |
43,47 |
Romains |
11,60 |
Hugo |
8,44 |
|
Romains |
54,59 |
Hugo |
43,24 |
Maeterlinck |
11,25 |
Apollinaire |
8,28 |
|
Mallarmé |
52,22 |
Perros |
42,72 |
Mallarmé |
10,20 |
Perros |
7,95 |
|
Éluard |
48,84 |
Roussel |
41,54 |
Éluard |
9,62 |
Roussel |
7,94 |
|
Supervielle |
47,84 |
Aragon |
40,55 |
Supervielle |
9,58 |
Aragon |
7,81 |
|
Pellerin |
47,67 |
Toulet |
38,68 |
Verlaine |
9,21 |
Elskamp |
7,48 |
|
Verlaine |
46,63 |
Elskamp |
37,88 |
Pellerin |
8,99 |
Toulet |
7,17 |
Le paramètre (la proportion de e) nest manifestement pas stable : un test de
c2 opposant les 16 poètes selon le nombre de vers avec et sans e, montre que la disparité observée na rien daléatoire (240,7 pour n = 15, soit p < 0,001) ; selon le nombre de syllabes avec ou sans e, c2 vaut 248,2 (pour n = 15, soit p < 0,001). Les poètes dont lécart par rapport au corpus est significatif sont marqués en italique.Ce nest pas ici le lieu dexaminer les causes de cette disparité : elles doivent tenir à des faits lexicologiques ou syntaxiques dont létude sortirait du cadre de la recherche ici menée. Retenons seulement que certains poètes paraissent éviter le post-tonique et dautres le privilégier. Contentons-nous de noter le fait, afin dy revenir plus tard.
Pour 9 des 16 poètes, les octosyllabes sont tirés de plusieurs recueils. Il est donc intéressant de vérifier que chacun de ces sous-corpus est homogène quant au trait étudié ci-dessus. Malgré des disparités parfois grandes dans les pourcentages chez plusieurs auteurs, les tests ne révèlent de différences significatives que dans deux cas : Mallarmé et Elskamp. Chez le premier, la voyelle féminine est significativement plus abondante dans les Poésies que dans les Vers de circonstance : dans 59,6 % des vers et 11,64 % des syllabes contre 51 % et 9,97 %. Quant à Elskamp, les pourcentages varient de 34,2 % à 42,8 % (vers) et de 8,60 % à 6,52 % (syllabes), sans que se dessine dans cette variation une quelconque évolution chronologique. Chez les 7 autres poètes, les variations peuvent être grandes, mais les tests montrent quelles ne sont pas significatives.
4. La place des e post-toniques dans les octosyllabes
De la 2
e à la 7e syllabe de loctosyllabe, la répartition des e post-toniques présente, dans lensemble du corpus, une tendance générale selon laquelle ces voyelles sont plus rares à mesure que lon séloigne du milieu du vers, le sommet de la courbe ainsi dessinée correspondant à la 5e syllabe. Dans le tableau suivant, les pourcentages de la 1re ligne sont calculés à partir de lensemble des e attestés (cest-à-dire la dernière ligne du tableau placé en annexe) ; à la 2e ligne les pourcentages représentent, pour chaque position, la proportion des e parmi toutes les voyelles attestées. Les deux séries présentent une courbe convergente.
Proportion des e |
2 e syll. |
3 e syll. |
4 e syll. |
5 e syll. |
6 e syll. |
7 e syll. |
Par rapport aux e des autres positions |
13,33 |
16,90 |
17,88 |
24,07 |
18,07 |
9,75 |
par rapport aux autres voyelles à la même position |
6,97 |
8,83 |
9,35 |
12,58 |
9,44 |
5,10 |
On observe cependant plus dun poète qui ne présente pas le même mouvement régulier de montée et de descente de la 2
e à la 7e syllabe : ainsi (pourcentages calculés par rapport aux autres voyelles aux mêmes positions), chez Mallarmé et Toulet, ce nest pas la 5e syllabe qui occupe le sommet de la courbe ; chez Roussel, Elskamp, Valéry et Éluard, le mouvement ne respecte pas la courbe générale.
Proportion des e |
2 e syll. |
3 e syll. |
4 e syll. |
5 e syll. |
6 e syll. |
7 e syll. |
Mallarmé |
8,89 |
10,50 |
12,10 |
11,46 |
11,84 |
6,43 |
Roussel |
3,49 |
11,03 |
9,56 |
7,72 |
10,11 |
5,70 |
Elskamp |
6,56 |
8,59 |
7,82 |
9,92 |
6,96 |
5,03 |
Toulet |
6,79 |
6,45 |
9,41 |
8,01 |
7,84 |
4,53 |
Valéry |
11,64 |
5,82 |
10,53 |
17,92 |
18,40 |
6,13 |
Éluard |
7,06 |
10,14 |
6,01 |
22,61 |
7,59 |
4,28 |
Il sera donc intéressant de comparer entre eux les 16 poètes, afin de déterminer déventuelles positions auxquelles ils privilégient ou évitent de manière significative les e post-toniques. Cette évaluation est faite en deux temps : dabord les syllabes paires seront opposées aux impaires, ensuite chaque syllabe sera examinée, en opposition avec toutes les autres.
a. Syllabes paires et impaires
Pour le premier test, deux totaux sont calculés pour chaque poète, lun cumulant les effectifs des e dans les trois syllabes paires, lautre ceux des impaires. Il a pour objet de répondre à la question posée au début : les octosyllabes de certains poètes peuvent-ils se lire plus aisément que dautres selon un rythme binaire iambique, avec ictus sur les syllabes paires ? dautres poètes ont-ils évité de manière significative un tel rythme ?
Le résultat du test est largement significatif :
c2 vaut 112,6, pour 15 degrés de liberté (soit p < 0,001). Dans lensemble du corpus, 49,28 % des e post-toniques occupent une syllabe paire. Chez les poètes, cette proportion varie de 35,81 à 57,59 %. Les 16 poètes se classent de la manière suivante, depuis ceux qui placent plus volontiers des e en syllabe paire jusquà ceux qui lévitent le plus :
selon le c2 (pourcentage de e en syllabe paire) |
selon le pourcentage de e en syllabe paire |
|||||||
Valéry |
57,59 |
Aragon |
50,15 |
Valéry |
57,59 |
Aragon |
50,15 |
|
Mallarmé |
53,63 |
Perros |
49,45 |
Toulet |
55,87 |
Perros |
49,45 |
|
Toulet |
55,87 |
Roussel |
48,65 |
Mallarmé |
53,63 |
Roussel |
48,65 |
|
Hugo |
51,42 |
Apollinaire |
48,60 |
Baudelaire |
52,94 |
Apollinaire |
48,60 |
|
Baudelaire |
52,94 |
Elskamp |
47,55 |
Pellerin |
52,59 |
Elskamp |
47,55 |
|
Verlaine |
51,11 |
Supervielle |
44,58 |
Hugo |
51,42 |
Supervielle |
44,58 |
|
Pellerin |
52,59 |
Maeterlinck |
38,60 |
Romains |
51,34 |
Maeterlinck |
38,60 |
|
Romains |
51,34 |
Éluard |
35,81 |
Verlaine |
51,11 |
Éluard |
35,81 |
Les valeurs partielles du
c2 montrent que les 3 premiers poètes (Mallarmé, Valéry et Toulet) se distinguent significativement par un nombre excessif de en syllabe paire, tandis que les 3 derniers présentent la tendance inverse (Maeterlinck, Supervielle, Éluard). Lensemble formé par les 10 autres poètes est quant à lui homogène (c2 = 9,2, pour 9 degrés de liberté, soit p = 0,5).Un exemple, tiré de Maeterlinck, illustrera bien leffet de rythme que peut avoir le placement fréquent de post-toniques en syllabes impaires plutôt que paires :
Mes doigts aux pâles indolences
Élèvent en vain, chaque soir,
Les cloches vertes de lespoir
Sur lherbe mauve des absences.
Lexamen de la série ainsi formée révèle dautres informations. Tout dabord, un certain mouvement chronologique, quoiquimparfait, sy dessine, contrarié par dautres traits. Un des premiers poètes, Mallarmé, est un des plus anciens ; le dernier, un des plus récents ; dautres poètes anciens figurent dans la première partie du classement : Baudelaire, Hugo, Verlaine. Ce phénomène partiel peut sinterpréter de la manière suivante. Dun poète qui évite plus que dautres de placer un e post-tonique dans une syllabe paire, on peut dire quil a tendance à appliquer à ses octosyllabes la lecture rythmée envisagée plus haut ; à linverse, de celui qui privilégie les positions paires, on peut dire quil ne cherche pas à composer des octosyllabes qui puissent facilement se scander de cette manière. Le premier se servait peut-être de ce rythme au moment de la composition des vers, tandis que le second nen avait aucun besoin. Lopposition des deux poètes extrêmes, Mallarmé et Éluard, signifierait dès lors que pour le premier (et pour Baudelaire avant lui ou Verlaine à son époque), loctosyllabe se concevait dun bloc, comme un série de 8 syllabes ; si lon se réfère à la thèse de Cornulier, la capacité de perception dune longueur métrique allait jusquà 8 chez ces poètes, tandis quà lautre bout de la chronologie, chez Éluard, elle sest réduite, au point quil lui faille sous-tendre son vers dun rythme particulier pour le composer. La même hypothèse vaut pour Supervielle, dont la période ici étudiée est légèrement antérieure à celle dÉluard.
On voit toutefois que la chronologie ne peut expliquer à elle seule le classement des 16 poètes. Toulet et Valéry sont postérieurs dau moins 20 ans à Mallarmé, les Serres chaudes de Maeterlinck précèdent Éluard de 55 ans. Inversement, Perros, le poète de loin le plus récent, figure au milieu du classement, sans tendance particulière. Ici interviennent plusieurs autres facteurs, dont le premier est laffinité que certains poètes peuvent entretenir avec un de leurs prédécesseurs. Cest certainement le cas de Valéry et Mallarmé, quand on sait linfluence queut le second sur le premier et ladmiration du premier pour le second. Quant à Toulet, si lon ne peut affirmer que Mallarmé fut une de ses influences majeures (on songerait plutôt à Moréas ou Verlaine), on constate toutefois quil partage avec lui, ainsi quavec Valéry, une qualité de versificateur exigeant, subtil, virtuose, que ne possèdent pas dautres poètes de notre corpus. Les trois auteurs qui, en tête de classement, se distinguent par un excès de en syllabes paires comptent donc parmi les plus attentifs à la forme et à la musicalité du vers : les trois "ciseleurs de vers" ont pour point commun de réduire la possibilité de rythmer iambiquement leurs octosyllabes.
À lautre bout de la série, le cas de Maeterlinck est différent. Contemporain de Verlaine et de Mallarmé, il inaugure dans le temps la tendance opposée. Un premier élément de sa différence se trouve peut-être dans son origine belge. Sans aller jusquà envisager des facteurs strictement linguistiques, on observera quil partage cette qualité avec Elskamp, le plus proche de lui parmi les poètes sans tendance significative. Tous deux, dautres part, écrivent des poèmes de style proche de la chanson, qui sans doute nécessite davantage dêtre rythmée ou y est plus propice.
Un autre trait permet dexpliquer la présence de trois poètes en fin de liste. Maeterlinck, Supervielle et Éluard ont pour point commun, qui les oppose radicalement à Mallarmé, Valéry et Toulet, davoir par ailleurs composé en vers libres : ceux-ci ne sont pas rares chez Supervielle et constituent la majorité de luvre dÉluard jusquà la période qui nous occupe ; quant à Maeterlinck, jai déjà dit que les poèmes des Serres chaudes sont écrits soit en octosyllabes soit en vers libres. Introduire dans leurs vers réguliers une plus grande possibilité de rythme a dû leur permettre de les démarquer nettement des vers libres ; du point de vue de la composition, la pratique des deux formes les a induits à saider, pour les vers réguliers, dun rythme suffisamment marqué.
Un dernier fait mérite attention : on trouve à lexact milieu de la série trois poètes, Romains, Perros et Roussel, de dates très différentes, mais dont le point commun est une tendance marquée au prosaïsme, que ce soit dans la syntaxe, le lexique, la thématique ou le rythme. Certes, ils voisinent avec des poètes qui nencourent pas cette qualification (Verlaine, Apollinaire) ; toutefois, sans glisser dans une catégorisation subjective qui distinguerait des poètes "plus poétiques" et dautres "plus prosaïques", notons que ce troisième groupe de trois poètes soppose nettement aux deux autres, où les uns, plus virtuoses, tiennent à marquer lunité monolithique de leur vers, tandis que les autres lui assurent un rythme plus marqué. À linverse, un style plus prosaïque névite ni ne privilégie le rythme binaire de loctosyllabe.
Les 6 poètes déviants figurent tous parmi ceux chez qui la fréquence du e post-tonique, toutes positions confondues, sécarte significativement, dans un sens ou dans lautre, du reste du corpus (cf. supra, 3). Il ny a toutefois pas de lien étroit apparent entre lune et lautre tendance. Valéry et Maeterlinck, Mallarmé et Éluard comptent parmi ceux dont les vers abondent en e, tandis que Toulet en est le plus avare : fréquence et position ne sont donc pas directement liées. Il faut cependant remarquer que la présence des 6 poètes dans les deux séries montre au moins quà ce double point de vue ils accordaient à le post-tonique une plus grande attention que les autres, en dépit des divergences de leurs tendances.
Le phénomène observé ici, à savoir le rejet ou lusage dun rythme iambique dans loctosyllabe, nest évidemment quune tendance plus ou moins forte pour 6 de nos 16 poètes ; elle ne constituent en rien une contrainte inexorable quils se fussent imposée : ainsi les vers de Maeterlinck ou dÉluard abondent en e post-toniques placés à des positions paires. Un exemple :
Palmes lentes de mes désirs,
Mousses froides, lianes molles.
Rappelons en outre que près dun vers sur deux en moyenne ne contient pas de.
b. La proportion de e à chacune des 6 syllabes
Lévaluation précédente ne porte que sur lopposition des syllabes paires et impaires. Deux poètes tels que Mallarmé et Éluard ont adopté, à légard des e en syllabe paire, une attitude globale diamétralement différente. Cela ne signifie toutefois pas a priori que lun évite plus que lautre cette voyelle à toutes les positions paires, ni que lautre ly privilégie sans distinction. Il convient donc de subdiviser lapproche de la question, en observant lattitude de chaque poète à légard de chacune des 6 positions.
6
c2 ont été calculés, un par syllabe, en prenant en compte les effectifs de e à cette position opposés à ceux des autres. Ils sont tous significatifs : aucune syllabe ne savère neutre dans notre corpus. On trouvera les valeurs de c2 à la 1re ligne du tableau ci-dessous ; pour 15 degrés, p < 0,001 sauf pour la 7e syllabe, où p = 0,01. À la 2e ligne figure le pourcentage moyen des e à chaque position dans le corpus total. Aux autres lignes figurent, pour chaque poète et à chaque position, les différences, positives ou négatives, observées entre les pourcentages de e dans son corpus et celles du corpus total ceci afin dapprécier la grandeur des écarts. Le gras indique les positions pour lesquelles sobserve chez tel poète un écart statistiquement significatif par rapport au reste du corpus.
|
2 e syll. |
3 e syll. |
4 e syll. |
5 e syll. |
6 e syll. |
7 e syll. |
||||||
Valeurs de c2 |
|
46,7 |
|
40,7 |
|
49,1 |
|
178,0 |
|
47,0 |
|
30,8 |
Pourcentage dans le corpus |
|
13,33 |
|
16,90 |
|
17,88 |
|
24,07 |
|
18,07 |
|
9,75 |
Baudelaire |
+ |
2,94 |
|
0,43 |
|
2,00 |
|
0,34 |
+ |
2,71 |
|
2,89 |
Hugo |
+ |
0,77 |
+ |
0,49 |
+ |
1,03 |
|
3,32 |
+ |
0,34 |
+ |
0,69 |
Mallarmé |
+ |
1,19 |
+ |
0,25 |
+ |
1,89 |
|
5,35 |
+ |
1,27 |
+ |
0,75 |
Verlaine |
+ |
0,74 |
|
0,25 |
+ |
0,82 |
|
3,32 |
+ |
0,27 |
+ |
1,74 |
Maeterlinck |
|
6,34 |
|
1,46 |
|
1,34 |
+ |
7,92 |
|
3,00 |
+ |
4,22 |
Roussel |
|
5,99 |
+ |
6,27 |
+ |
2,20 |
|
7,85 |
+ |
3,17 |
+ |
2,22 |
Elskamp |
+ |
1,28 |
+ |
2,24 |
|
0,45 |
|
1,96 |
|
2,57 |
+ |
1,45 |
Romains |
+ |
1,29 |
+ |
0,57 |
+ |
2,08 |
|
1,97 |
|
1,31 |
|
0,66 |
Apollinaire |
|
1,12 |
+ |
1,06 |
|
0,08 |
|
0,13 |
+ |
0,53 |
|
0,25 |
Toulet |
+ |
2,46 |
|
1,92 |
+ |
3,98 |
|
5,45 |
+ |
0,15 |
+ |
0,78 |
Valéry |
+ |
3,19 |
|
8,64 |
|
2,92 |
+ |
1,38 |
+ |
8,05 |
|
1,04 |
Pellerin |
+ |
0,03 |
|
1,81 |
+ |
3,24 |
|
0,79 |
+ |
0,03 |
|
0,70 |
Supervielle |
|
2,73 |
|
1,28 |
|
1,12 |
+ |
6,37 |
|
0,85 |
|
0,40 |
Aragon |
+ |
1,60 |
|
0,15 |
|
0,83 |
+ |
1,06 |
+ |
0,09 |
|
1,78 |
Éluard |
|
1,09 |
+ |
0,68 |
|
7,46 |
+ |
15,12 |
|
4,92 |
|
2,33 |
Perros |
|
1,76 |
|
0,55 |
+ |
1,58 |
+ |
0,97 |
+ |
0,35 |
|
0,60 |
Nous nous intéresserons essentiellement aux 6 poètes déjà signalés et aux deux positions centrales (4
e et 5e).Les 3 poètes qui privilégient e en position paire ne le font pas nécessairement à chacune des 3 syllabes impliquées. Chez Mallarmé et Toulet, elles sont en excès par rapport à la moyenne, mais aucun écart nest significatif ; cest surtout un déficit en e à la 5
e qui les caractérise. Quant à Valéry, la situation est plus confuse : deux syllabes paires sont en excès significatif, mais non la 4e ; une syllabe impaire est en déficit (la 3e). Chez les 3 poètes opposés, les syllabes impaires doivent être privilégiées au détriment des paires ; on constate localement que certaines syllabes ne suivent pas ce schéma ; le trait le plus marquant reste un excès de en 5e syllabe, renforcé chez Éluard par un double déficit en 4e et 6e.Ces quelques observations amènent à compléter lanalyse précédente : le principal enjeu de la variation de fréquence se situe à la 5
e syllabe : les uns évitent autant quils le peuvent dy placer un e post-tonique, les autres ly emploient à lexcès ; les uns sont Mallarmé et Toulet, mais aussi dautres poètes de notre première période (Hugo, Verlaine, Roussel) ce qui confirme notre hypothèse chronologique , les autres Maeterlinck, Supervielle et Éluard.La 5
e syllabe est une position stratégique : y placer un e revient à amener en 4e un accent verbal, dont la présence à cet endroit du vers y ménage ipso facto lapparition dune "césure", comparable à celle que produit en 4e laccent verbal dun mot masculin (cf. supra). Les deux marques diffèrent en ceci quune fin de mot masculine en 4e produit une césure identique à celle de lalexandrin classique, tandis quune syllabe féminine en 5e entraîne une coupe enjambante (avec récupération de féminine) ; la première dégage nettement deux sous-vers dans loctosyllabe, tandis que la seconde les garde davantage liés.Manifestement, les poètes du premier groupe (excepté Valéry) se refusent autant que possible à marquer ou suggérer une césure qui partagerait le vers en deux segments égaux ; ce faisant ils imposent au lecteur une lecture globale du vers, sans pause ; ils distinguent radicalement loctosyllabe des vers complexes en soulignant sa nature de plus long vers simple. Les 3 autres poètes, quant à eux, le rapprochent davantage de ces vers complexes, tels lalexandrin. Un exemple le montrera, extrait dÉluard ; les accents verbaux en 4
e syllabes, suivis ou non dune voyelle féminine, sy cumulent pour marquer un rythme assez constant :[...]
Où est la lettre sans réponse
Et la poussière des paroles
Cette confiance dans la vie
Qui tout à coup devient silence
Je nie les larmes leur lumière
Mes yeux ne sont plus de ce monde
Je suis passée tout est passé
Je suis une ombre dans le noir
Je suis le germe du désordre.
Ceci ne se produit évidemment pas au milieu de chaque octosyllabe : nombre de vers possèdent en 4
e un accent verbal, quil soit suivi ou non dune syllabe féminine, mais non tous il ne sagit, répétons-le, que dune tendance, liée à un rythme virtuel auquel leurs vers sont globalement plus aptes que ceux dautres poètes.5. Conclusion
En mettant au jour ces tendances opposées, cette étude a pu, à partir dun paramètre unique et bien délimité, déterminer lattitude de certains poètes à légard du vers quils utilisent : leur capacité de perception des longueurs au moment de la composition nest pas indifférente, non plus que leur conception du vers lui-même, de sa nature et du rythme quil convient de lui imprimer à la lecture.
Létude pourrait être approfondie et élargie. Évoquée plus haut, la question des coïncidences daccents verbaux en syllabes finales avec les ictus mériterait lexamen ; peut-être confirmerait-elle les conclusions de ce premier volet. Une question mène donc à une autre : certains poètes évitaient-ils plus que dautres de placer au milieu de leurs octosyllabes une coupe aussi nette que la césure dun alexandrin classique ?
Une autre question : queussent pensé ces poètes dune telle observation de leurs vers ? Je dois ici citer Valéry lui-même :
Le ridicule de la scansion des vers métriques Réduire la musique à battre la mesure, quand la musique consiste à faire oublier la mesure tout en lobservant rigoureusement.
Lavis est rédhibitoire, mais il confirme et justifie notre étude : car en évitant de favoriser une lecture iambique de ses octosyllabes, que voulait Valéry, sinon "faire oublier" la scansion "tout en observant rigoureusement" la mesure, cest-à-dire la longueur du vers ?
|
|
|
Vers avec |
Syll. avec |
Epost |
|||||
|
|
|
e post. |
e post. |
2e syll. |
3e syll. |
4e syll. |
5e syll. |
6e syll. |
7e syll. |
Baudelaire , Fleurs du mal |
1857 |
989 |
444 |
510 |
83 |
84 |
81 |
121 |
106 |
35 |
Hugo , Chansons des rues et des bois |
1865 |
3122 |
1350 |
1581 |
223 |
275 |
299 |
328 |
291 |
165 |
Mallarmé |
1887,1893 |
1867 |
975 |
1143 |
166 |
196 |
226 |
214 |
221 |
120 |
Poèmes |
|
265 |
158 |
185 |
35 |
25 |
38 |
31 |
31 |
25 |
Vers de circonstance |
[posth.] |
1602 |
817 |
958 |
131 |
171 |
188 |
183 |
190 |
95 |
Verlaine |
|
2033 |
948 |
1123 |
158 |
187 |
210 |
233 |
206 |
129 |
Poèmes saturniens |
1866 |
85 |
45 |
52 |
6 |
7 |
13 |
12 |
10 |
4 |
Fêtes galantes |
1869 |
195 |
81 |
95 |
11 |
16 |
16 |
28 |
9 |
15 |
La Bonne chanson |
1870 |
131 |
56 |
59 |
8 |
14 |
3 |
13 |
15 |
6 |
Romances sans paroles |
1874 |
102 |
45 |
56 |
9 |
11 |
9 |
12 |
8 |
7 |
Sagesse |
1881 |
297 |
152 |
184 |
33 |
33 |
32 |
33 |
32 |
21 |
Jadis et Naguère |
1884 |
204 |
111 |
126 |
12 |
19 |
28 |
25 |
27 |
15 |
Amour |
1888 |
354 |
158 |
187 |
32 |
29 |
42 |
32 |
30 |
22 |
Parallèlement |
1889 |
665 |
300 |
364 |
47 |
58 |
67 |
78 |
75 |
39 |
Maeterlinck , Serres chaudes |
1889 |
403 |
220 |
272 |
19 |
42 |
45 |
87 |
41 |
38 |
Roussel , LÂme de Victor Hugo |
[1894] |
544 |
226 |
259 |
19 |
60 |
52 |
42 |
55 |
31 |
Elskamp |
|
3004 |
1138 |
1348 |
197 |
258 |
235 |
298 |
209 |
151 |
Six chansons du pauvre homme |
1895 |
152 |
65 |
72 |
8 |
7 |
20 |
11 |
15 |
11 |
Enluminures |
1898 |
398 |
142 |
169 |
18 |
31 |
34 |
38 |
31 |
17 |
Chansons désabusées |
1922 |
690 |
237 |
270 |
50 |
45 |
50 |
60 |
38 |
27 |
La Chanson de la rue Saint-Paul |
1922 |
377 |
135 |
152 |
17 |
39 |
29 |
29 |
20 |
18 |
Les Délectations moroses |
1923 |
573 |
231 |
286 |
44 |
46 |
45 |
66 |
48 |
37 |
Chansons damures |
1923 |
196 |
67 |
80 |
6 |
17 |
13 |
20 |
14 |
10 |
Aegri somnia |
1924 |
618 |
261 |
319 |
54 |
73 |
44 |
74 |
43 |
31 |
Romains |
|
806 |
440 |
561 |
82 |
98 |
112 |
124 |
94 |
51 |
La Vie unanime |
1908 |
287 |
156 |
210 |
24 |
37 |
42 |
47 |
38 |
22 |
Odes et prières |
1913 |
164 |
84 |
100 |
15 |
19 |
16 |
27 |
16 |
7 |
Europe |
1916 |
355 |
200 |
251 |
43 |
42 |
54 |
50 |
40 |
22 |
Apollinaire |
|
2521 |
1096 |
1253 |
153 |
225 |
223 |
300 |
233 |
119 |
Bestiaire |
1911 |
113 |
57 |
70 |
12 |
11 |
8 |
21 |
15 |
3 |
Alcools (sans la Chanson ...) |
1913 |
285 |
119 |
145 |
25 |
31 |
26 |
30 |
17 |
16 |
Chanson du mal aimé |
1913 |
280 |
114 |
130 |
8 |
21 |
37 |
27 |
21 |
16 |
Poèmes à Lou |
[1914-15] |
323 |
138 |
152 |
11 |
23 |
31 |
38 |
31 |
18 |
Poèmes à Madeleine |
[1915-16] |
69 |
32 |
37 |
3 |
5 |
6 |
13 |
6 |
4 |
Vitam impendere amori |
1917 |
65 |
29 |
32 |
1 |
10 |
5 |
6 |
8 |
2 |
Calligrammes |
1918 |
528 |
247 |
279 |
34 |
52 |
40 |
69 |
56 |
28 |
Le Guetteur mélancolique |
posth. |
195 |
72 |
76 |
12 |
13 |
10 |
18 |
16 |
7 |
Il y a |
posth. |
174 |
85 |
95 |
12 |
22 |
15 |
23 |
16 |
7 |
[Poèmes posthumes] |
posth. |
489 |
203 |
237 |
35 |
37 |
45 |
55 |
47 |
18 |
Toulet , Contrerimes |
|
574 |
222 |
247 |
39 |
37 |
54 |
46 |
45 |
26 |
Contrerimes |
1921 |
400 |
153 |
168 |
23 |
26 |
41 |
33 |
30 |
15 |
Chansons |
1921 |
56 |
26 |
33 |
9 |
1 |
3 |
8 |
8 |
4 |
Dizains |
1921 |
118 |
43 |
46 |
7 |
10 |
10 |
5 |
7 |
7 |
Valéry , Charmes |
1922 |
636 |
362 |
448 |
74 |
37 |
67 |
114 |
117 |
39 |
Pellerin , La Romance du retour |
1921 |
430 |
205 |
232 |
31 |
35 |
49 |
54 |
42 |
21 |
Supervielle |
|
1526 |
730 |
877 |
93 |
137 |
147 |
267 |
151 |
82 |
Gravitations |
1925 |
397 |
196 |
234 |
33 |
40 |
34 |
66 |
40 |
21 |
Le Forçat innocent |
1930 |
96 |
52 |
67 |
8 |
16 |
8 |
20 |
8 |
7 |
Les Amis inconnus |
1934 |
109 |
53 |
64 |
5 |
11 |
9 |
18 |
11 |
10 |
La Fable du monde |
1938 |
346 |
152 |
175 |
14 |
18 |
30 |
62 |
38 |
13 |
1939-1945 |
1946 |
578 |
277 |
337 |
33 |
52 |
66 |
101 |
54 |
31 |
Aragon |
|
2116 |
858 |
991 |
148 |
166 |
169 |
249 |
180 |
79 |
Le Crève-cur |
1941 |
277 |
110 |
134 |
29 |
24 |
20 |
29 |
19 |
13 |
Les Yeux dElsa |
1942 |
136 |
65 |
74 |
16 |
10 |
16 |
13 |
16 |
3 |
Le Roman inachevé |
1956 |
1072 |
414 |
473 |
67 |
85 |
85 |
119 |
80 |
37 |
Le Voyage de Hollande |
1964 |
631 |
269 |
310 |
36 |
47 |
48 |
88 |
65 |
26 |
Éluard |
|
1331 |
650 |
768 |
94 |
135 |
80 |
301 |
101 |
57 |
Au rendez-vous allemand |
1944-46 |
135 |
67 |
78 |
9 |
15 |
9 |
30 |
9 |
6 |
Lingères Légères |
1945 |
18 |
7 |
7 |
0 |
1 |
2 |
1 |
2 |
1 |
Poésie ininterrompue |
1946 |
70 |
47 |
53 |
7 |
8 |
5 |
26 |
4 |
3 |
Le Dur désir de durer |
1946 |
64 |
33 |
36 |
5 |
5 |
2 |
16 |
7 |
1 |
Le Temps déborde |
1947 |
29 |
12 |
13 |
1 |
1 |
0 |
9 |
2 |
0 |
Corps mémorable |
1947 |
36 |
16 |
28 |
5 |
1 |
4 |
12 |
3 |
3 |
Léda |
1949 |
33 |
23 |
20 |
1 |
5 |
2 |
7 |
4 |
1 |
Grèce ma rose de raison |
1949 |
84 |
38 |
43 |
7 |
14 |
5 |
12 |
5 |
0 |
Une leçon de morale |
1950 |
178 |
81 |
103 |
15 |
19 |
1 |
53 |
10 |
5 |
Pouvoir tout dire |
1951 |
20 |
12 |
12 |
1 |
2 |
2 |
3 |
4 |
0 |
Le Phénix |
1951 |
83 |
38 |
46 |
5 |
11 |
2 |
14 |
9 |
5 |
Poésie ininterrompue 2 |
1953 |
581 |
276 |
329 |
38 |
53 |
46 |
118 |
42 |
32 |
Perros , Une vie ordinaire |
1967 |
3642 |
1556 |
1737 |
201 |
284 |
338 |
435 |
320 |
159 |
Totaux |
|
25544 |
11420 |
13350 |
1780 |
2256 |
2387 |
3213 |
2412 |
1302 |