FRÉQUENCE ET DISPONIBILITÉ LEXICALES ET LA FORMULE DITE ORALE DANS LA CHANSON DE GESTE
Edward A. Heinemann
Department of French, New College
University of Toronto
Toronto, Ontario, Canada M5S 1A1
Résumé
Early results in the study of verbs of discourse in three Old French epics suggest a few possible members of the traditional stock of "oral formulas", understood in terms of the Parry-Lord theory as metrically useful phrases. Since metrical utility should correlate to relatively high frequencies, we seek to establish a possible range in which such frequencies fall, taking account as well of both esthetic effects like allusion and normal variations among individual poems.
Cest à Jean Rychner que revient le mérite davoir renouvelé, pour ne pas dire bouleversé, les études de la chanson de geste en 1955, date où parut son étude mettant à jour la vieille notion romantique dune poésie orale émanant du peuple, et fondant son analyse sur une véritable tradition orale, étudiée par Milman Parry et Albert Lord en ex-Yougoslavie. Un des principaux éléments de lanalyse de Parry est le vers ou lhémistiche répété, conçu comme formule orale, doù un intérêt tout particulier porté aux expressions répétées, qui témoigneraient dune improvisation et dune transmission orales. La présente communication se situe à lintersection de plusieurs lignes de réflexion qui se dégagent du problème de la répétition dans la versification épique française.
1. Le chapitre 2 du livre de Lord, "Singers : Performance and Training", décrivant la formation des chanteurs illettrés, évoque lapprentissage, non dun ensemble de tournures toutes faites, mais plutôt dun langage particulier où les unités de sens correspondent au vers et à lhémistiche. Cest dire quils apprennent une variante pour ainsi dire métrique de leur langue maternelle.
2. Au troisième colloque international de la Société Rencesvals, Frederick Whitehead a suggéré que nombre des expressions qui se répètent à travers le genre appartiennent à lancien français élémentaire et que cest la servitude métrique qui en explique leur fréquence élevée. Ladjonction dune règle métrique à la grammaire de la chanson de geste se répercute sur les fréquences relatives de mots et dexpressions.
3. Examinant des clichés formulaires dans des chansons traitant de Guillaume dOrange, Duncan McMillan sest attaché à un ensemble marqué par ce quil appelle leur spontanéité (par opposition au caractère "conditionné" de tournures qui relèvent de contextes particuliers, tels lescu embrace et flors et pierres qui ne paraissent que dans les combats). Tenant donc compte de la disponibilité, nous examinons un détail narratif assez banal, la présentation de discours.
4. Dès le départ, Milman Parry insistait, pour des raisons de méthode, sur une distinction capitale. Supposant quà partir dune certaine proportion dhémistiches répétés, un poème pouvait être considéré oral, il écartait de son compte toute répétition qui sexpliquait par la recherche dun effet, comme par exemple les allusions. La formule orale se caractérisant par son utilité métrique, cest par ce côté que sexplique sa présence dans les textes. Or, comme nombre de chansons de geste organisent leur récit, dans les grandes lignes comme dans les petits détails, au moyen de récurrences, si nous cherchons à cerner le langage traditionnel, nous devons distinguer récurrences dues à la simple fréquence lexicale du genre et récurrences à effet.
Par ailleurs nous tenons à signaler que le langage traditionnel porte en lui-même des effets poétiques, mais il est assez simple de voir la différence entre, dune part des hémistiches qui se répètent dans deux passages renvoyant visiblement lun à lautre, et dautre part des hémistiches plus ou moins isolés, éparpillés partout dans les poèmes.
5. Depuis quelque temps nous travaillons avec une base textuelle comprenant les trois poèmes décasyllabiques du noyau du cycle de Guillaume dOrange : le Couronnement de Louis (2670 vers), le Charroi de Nîmes (1486 vers), et la Prise dOrange (1888 vers), soit 43.830 occurrences et 5535 "mots" différents dans un total de 6044 vers. Lintérêt principal de létude porte sur le jeu très développé de renvois par répétition organisant les poèmes ; une des composantes de ce jeu les plus difficiles à cerner est le langage traditionnel. Nous aimerions avoir une idée plus claire de la tradition au sein de laquelle luvre se situe (justement les textes chantés, et de ce fait disparus à tout jamais) afin dapprécier les effets esthétiques qui en découlent. Cest ainsi que, dans un travail dapproche, nous cherchons à discerner quelques types à fréquences élevées, des points de repère quantitatifs dans la description de la stéréotypie épique.
Les spécialistes du genre reconnaissent facilement certains éléments stéréotypés du langage épique. Chacun pourra deviner, par exemple, que le verbe dire est plus fréquent que escrier, mais les chiffres nous manquent. Voici, à titre dexemple, les principaux verbes de présentation du discours dans les trois poèmes de ma base textuelle : dire 447, respondre 77, apeler 63, parler 51, demander 43, escrier 33, araisnier 25, huchier 10 (voir en appendice les requêtes servant à réunir les occurrences de ces mots). Ces chiffres fournissent une idée de la fréquence relative de ces huit verbes, mais des précisions, dont suivent quelques-unes seraient pertinentes.
Commençons par le caractère peu stéréotypé du verbe parler, à deux exceptions près. Première exception, dans la Prise dOrange, les différents personnages masculins se plaisent à dénoncer les propos du héros dans des hémistiches comme vos parlez de neant, vos parlez par folage, vos parlez folement. Sur les dix-sept occurrences de la deuxième personne du pluriel, seize sont de ce type, dont seulement trois figurent dans le Couronnement et une dans le Charroi. Il sagit dun des thèmes principaux de la Prise, dont les occurrences sont vigoureusement marqué par des échos où paraissent, justement, des vers de ce type ; si CN 998 ne semble pas évoquer les occurrences de la Prise, on peut légitimement se demander si CL 1405, 1806, et 2424 sont des allusions à la Prise.
2parlezfolie
October 10, 1997
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parlés (1)
PO XLVII, 1417 | Si m'aïst Dex _ vos parlés de granz beffes | Que
parlez (15/16)
CL XXXII, 1405 li quens: _ "De folie parlez. | De traïson _ ne fui
CL XLII, 1806 dist Aliaumes, _ "vos parlez en pardon; | Il nel
CL LVIII, 2424 | Respont li quens: _ "Vos parlez folement; | Quant Looÿs
CN XL, 998 Et dist Bertran _ por neant en parlez | Ge ne sai tant _ ne
PO XIX, 591 | Dist Arragon _ de folie parlez | Or manderai _ en
PO XXIX, 910 | Oncle Guillelmes _ vos parlez de neant | Par amistiez
PO XXXIII, 1033 | Oncle Guillelmes _ vos parlez en pardon | Que par
PO XXXIV, 1057 | Oncle Guillelmes _ vos parlez de folaige | Que par
PO XXXV, 1083 | Et dist Guillelmes _ vos parlez de neant | Assez avrons
PO XLIII, 1337 | Oncle Guillelmes _ vos parlez de neant | Mandez
PO XLVIII, 1426 | Oncle Guillelmes _ vos parlez de neant | Ne vos
PO LIV, 1553 putage | Dist Guïelins _ vos parlez par folage | Vos et mes
PO LIX, 1763 | Dist Gilebert _ vos parlez de folie | Qu'ele ne
PO LX, 1770 | Dist Gilebert _ vos parlez de neant | Ne la
PO LX, 1790 | Dist Gileberz _ vos parlez folement | Ge nel
Dautre part, le verbe parler figure avec apeler, aresnier, dire, escrier, huchier dans la formule inchoative, commença a ou se prist a plus linfinitif (23 occurrences, dont deux avec parler).
2parlerinchoat
October 10, 1997
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commença (5/15)
CL XXIX, 1301 | Li rois Galafres _ commença a huchier; | A voiz
CL LVI, 2306 | Tant que Guillelmes _ commença a huchier: |
PO XIII, 334 | Ses niés Bertran _ li commença a dire | Oncle fet il
PO XX, 616 perrine | Rois Arragon _ li commença a dire | Sire dist il
PO XXVIII, 880 entré | As Sarrazins _ commença a parler | Mal
commence (2/10)
CL LX, 2589 | Voit le Guillelmes, _ si commence a huchier: |
PO LIX, 1759 mie | Ou voit le mes _ si li commence a dire | Gilebert
conmença (5/7)
CN V, 129 le nes | De grant outrage _ conmença a parler | Vers Looÿs
CN XV, 336 changier | A sa voiz clere _ conmença a huchier | Entendez
CN XXXIV, 902 | Li quens Guillelmes _ li conmença a dire | Diva vilain
CN XLVIII, 1185 | | Li rois Otrans _ li conmença a dire | Tiacre frere
CN L, 1317 ataïnent | Li rois Otrans _ li conmença a dire | Diva vilains
conmencent (1/2)
CN XXVI, 658 et lié | A haute voiz _ conmencent a huchier | Sire
prent (1/20)
CL LII, 2105 | Ou voit le duc, _ sel prent a aresnier: | "Dux", dit
prist (8/36)
CL VIII, 101 | De granz losenges _ le prist a aresnier: | "Droiz
CL XVI, 347 piez | Et l'apostoiles _ l'en prist a aresnier: | "He!
CL XVI, 359 | Ses niés Bertran _ l'en prist a aresnier: | "Oncle
CL XLV, 1945 Voit le Guillelmes, _ si li prist a huchier: | "Outre,
CN XXVI, 680 ciel | Ou voit le roi _ sel prist a aresnier | Droiz
CN XXVI, 725 amistié | Molt belement _ le prist a aresnier | Sire
CN XLVII, 1154 | | Li rois Otrans _ l'en prist a apeler | Tiacre frere
CN LIII, 1359 | A sa voiz clere _ se prist a escrïer | Felon paien
pristrent (1/5)
CN LVII, 1454 Li Franc le voient _ si li pristrent a dire | |
Ainsi, sur les 51 occurrences du verbe, deux pourraient appartenir au stock traditionnel tandis que seize figurent dans des répétitions dont la plupart constitutuent un réseau organisant lélaboration thématique dun poème.
Sept sur dix occurrences de huchier figurent dans la formule inchoative. Les 25 occurrences de araisnier figurent toutes en position finale du vers, ce qui semble conférer au verbe une certaine stéréotypie : les six occurrences de linfinitif appartiennent toutes à la formule inchoative, et les formes personnelles semblent favoriser lun ou lautre de deux modèles, lun au présent et lautre au passé, et tous deux sujets à diverses variations (ses a, len a pour le passé ; adverbe en position initiale pour le présent).
@araisnier
October 12, 1997
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CL VIII, 101 granz losenges _ le prist a aresnier: | "Droiz empereres,
CL XVI, 347 l'apostoiles _ l'en prist a aresnier: | "He! gentils hom,
CL XVI, 359 niés Bertran _ l'en prist a aresnier: | "Oncle Guillelmes,
CL XVII, 454 apostoles _ de maintenant l'aresne: | "Sire", fet-il,
CL XVII, 477 rois Galaffres _ encore l'en aresne: | "Parlez a moi,
CL XXI, 796 | Ou voit Guillelme _ si l'a aresonné: | "Di moi, François,
CL XXXV, 1513 truevent, _ si l'ont lors aresnié: | "Oevre la porte,
CL XLIV, 1892 Voit Acelin, _ forment l'en aresonne: | "Traïtres lerres,
CL XLIV, 1897 Guillelmes, _ fierement l'aresonne: | "Beau niés
CL LII, 2105 voit le duc, _ sel prent a aresnier: | "Dux", dit
CL LVI, 2266 | Un per de Rome _ en avoit aresnié: | "Hé! gentix sire,
CL LVII, 2410 le mes _ fierement l'en aresne. | | "Amis, biaus
CN XI, 293 | Au redrecier _ l'en a aresoné | | Sire Guillelmes
CN XVIII, 479 | Ou voit le roi _ si l'a aresonné | Icestui don _ par
CN XXVI, 680 Ou voit le roi _ sel prist a aresnier | Droiz emperere
CN XXVI, 725 | Molt belement _ le prist a aresnier | Sire Guillelmes
CN XXXIII, 848 Ou voit ses homes _ ses a aresonez | Baron dist il
CN XXXIII, 887 Li quens Bertrans _ l'en a aresoné | Di nos vilain _ par
CN XXXV, 938 | Ou qu'il les voit _ ses a aresonnez | Baron dist il
CN XLIX, 1215 | Cortoisement _ l'en a aresonez | Si l'en apele _ con
CN XLIX, 1259 | Cortoisement _ l'en a aresonné | Damoiseaus sire
PO XV, 438 | Cortoisement _ l'en a araisoné | Sire dist il
PO XXXI, 962 | I l'en apele _ doucement l'aresonne | Dame dist il _ por
PO XXXIV, 1047 Il les apele _ belement et aresne | Fill a putain
PO L, 1469 | Quant il le vit _ si l'en a aresnié | Amirauz sire _ fetes
Comparer les 31 occurrences de apele au premier hémistiche (sur 35 occurrences de cette forme au total), dont nombre offrent léquivalent en quatre syllabes de la formulation en six avec araisnier.
apele; when hemistich 1
October 10, 1997
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apele (31/35)
CL XIII, 257 grant masse; | Plorant apele _ Guillelme Fierebrace:
CL XXXIV, 1463 a gité un ris; | Bertran apele, _ si l'a a reson mis: |
CL XXXV, 1537 joianz et liez. | Bertran apele: _ "Entendez, sire
CL XXXVI, 1582 terre clinez; | Bertran apele: _ "Sire niés,
CL XXXVIII, 1628 conseillier. | Bertran apele: _ "Entendez, sire
CL XL, 1731 ton cors aidier." | Lors en apele _ les gentix
CL XLII, 1759 fu mout chevaleros. | Il en apele _ Looÿs son segnor: |
CL XLII, 1765 bien l'otroion." | Il en apele _ Aliaume le baron: |
CL XLII, 1784 de compaignons, | Il l'en apele _ hautement, oiant toz:
CL LI, 2089 prist grant frëor; | Il en apele _ endeus ses
CL LVIII, 2469 choisi tot avant; | Il en apele _ Guïelin et Bertran: |
CL LXII, 2641 cuide desver. | Bertran apele: _ "Sire niés,
CN XXIV, 597 Bernart de Breban | Il les apele _ hautement en oiant |
CN XLIX, 1216 _ l'en a aresonez | Si l'en apele _ con ja oïr porrez |
PO III, 54 _ en France demener | Bertran apele _ sire niés ça venez |
PO IV, 83 _ et le melle chantant | Il en apele _ Guïelin et Bertran |
PO VII, 180 mesagier estrange | Il l'en apele _ et puis si li demande
PO VIII, 214 sor un perron | Il l'en apele _ si li dist par amor |
PO XI, 301 _ li a dite et contee | Il en apele _ la gent de sa contree
PO XVII, 511 el palés sor la tor | Il en apele _ ses autres
PO XXIII, 720 mesaiges | Lors les apele _ de noiant ne se targe
PO XXVIII, 888 cuide changier | Il en apele _ Sarrazins et paiens |
PO XXXI, 962 _ a la dame seconde | I l'en apele _ doucement l'aresonne |
PO XXXIV, 1047 qui se targent | Il les apele _ belement et aresne |
PO XLI, 1228 _ a la clere façon | Elle en apele _ son fillastre Arragon
PO XLI, 1244 mar seroiz a sejor | Ele en apele _ le feilon traïtor |
PO XLII, 1298 si commença a rire | Il en apele _ la gent de son enpire
PO L, 1483 le sens cuide changier | Il en apele _ Sarrazins et Escler |
PO LVII, 1650 sens cuide desver | Il en apele _ Sarrazins et Escler |
PO LX, 1786 mout Bertran | Li mes apele _ si li dit en oiant |
PO LX, 1852 au cors vaillant | Bertran apele _ si li dit en oiant |
Deux formules représentent la quasi totalité des 59 occurrences de respondre au premier hémistiche (18 occurrences au second): Respont + terme désignant un personnage en deux syllabes (nom propre [17 occurrences, toutes dans CL] ou article suivi de nom commun, 17 occurrences, dont une dans CN et le reste dans CL), et Et cil respont / responent (CL 14, CN 7, PO 2).
@respondre; when hemistich 1
October 10, 1997
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responent (6)
CL XVII, 448 gentil home sage." | Et cil responent: _ "Bien est droiz
CL LI, 2097 el mostier de Tors." | Et cil responent: _ "De quoi le dotez
CL LVIII, 2473 chiers garnemenz. | Et cil responent: _ "Tot a vostre
CN V, 122 _ que il a tot trové | Et cil responent _ si con vos
CN XXXIII, 858 soit abandonez | Et cil responent _ si con vos
PO LI, 1492 _ sera chier comparé | Et cil responent _ si com vos
responnent (4)
CL XXVIII, 1196 eschapera un. | Et cil responnent: _ "Cist conseuz
CL LIII, 2151 pooit estre!" | Et cil responnent: _ "Por Deu, merci,
CN XXX, 828 _ por la crestïenté | Et il responnent _ si con vos
CN XXXV, 947 _ ne lancié ne rüé | Et cil responnent _ vos dites verité
respont (49/55)
CL XII, 215 _ te puez mout bien fier. | Respont li enfes: _ "Voir
CL XII, 225 _ mes garnemenz baillier." | Respont li quens: _ "Par ma
CL XIII, 263 _ tot ira a damage." | Respont li quens: _ "Ne soiez
CL XVI, 362 home _ ne vos vi esmaier." | Respont Guillelmes: _ "Merci,
CL XVII, 422 _ et espee qui taille." | Respont li quens: _ "C'est
CL XVII, 425 et les barres." | Et cil respont: _ "Bien est droiz
CL XVII, 465 _ gentix rois deboneres." | Respont li rois: _ "Tu n'es
CL XVIII, 506 _ velt Rome chalengier." | Respont li rois: _ "Toz en sui
CL XVIII, 525 _ ca hors apareillier." | Respont li rois: _ "N'es pas
CL XIX, 632 _ n'a talent qu'il remut." | Respont Corsolt: _ "Morz est
CL XXIII, 890 qui desoz lui le garde." | Respont li Turs: _ "Tu n'es
CL XXIX, 1260 les desloier." | Et il respont: _ "De folie
CL XXIX, 1282 _ sont estroit et lïé?" | Respont li rois: _ "Or
CL XXXI, 1349 _ soiez mes heritiers. | Respont li quens: _ "Moi
CL XXXI, 1354 _ de terre avez mestier. | Respont li quens: _ "Bien fet
CL XXXII, 1395 _ s'il est desheritez." | Respont li quens: _ "Si com
CL XXXII, 1405 _ avra Rome a garder. | Respont li quens: _ "De folie
CL XXXII, 1413 ses en doiz bien porter. | Respont li quens: _ "Ce fet a
CL XXXVI, 1562 _ soffrir ne endurer." | Respont Guillelmes: _ "Nos en
CL XXXVIII, 1624 la teste a tranchier." | Respont Guillelmes: _ "Bien
CL XXXVIII, 1631 _ a loi de chevalier. | Respont Bertran: _ "Biau sire,
CL XXXVIII, 1649 tranchiez. | Et cil respont: _ "Beau sire,
CL XXXIX, 1657 et ocis. | Et cil respont: _ "Tot a vostre
CL XXXIX, 1673 n'i ait menti." | Et cil respont: _ "Ja le vos avrai
CL XXXIX, 1707 li crie merci." | L'enfes respont: _ "Tot a vostre
CL XL, 1711 li cheoir au pié." | L'enfes respont: _ "Beau sire,
CL XL, 1739 _ comme larron fossier." | Respont Guillelmes: _ "Bien
CL XLII, 1769 de lui se plaint mout." | Respont Aliaumes: _ "Irai ge i
CL XLII, 1777 _ por l'anor de Mascons." | Respont Aliaumes: _ "Vostre
CL XLII, 1816 _ ce li di de par nos." | Respont Aleaumes: _ "Bien oi
CL XLIII, 1835 destruire et essillier." | Respont Aleaumes: _ "Dahé ait
CL LI, 2103 por tot l'or de cest mont." | Respont Guillelmes: _ "Vostre
CL LV, 2243 _ et encor plus assez." | Respont li rois: _ "Dex vos en
CL LVI, 2272 vos irai aidier." | Et cil respont: _ "Bien fet a
CL LVI, 2296 d'aïde ont grant mestier." | Respont li quens: _ "Nos
CL LVI, 2302 des puis la mort Gaifier." | Respont Bertrans: _ "Bien fet
CL LVII, 2357 mon heritage." | Et cil respont: _ "Bien est droiz que
CL LVIII, 2424 _ par le vostre comant." | Respont li quens: _ "Vos
CL LVIII, 2437 trové as Frans?" | Et cil respont: _ "N'en celerai
CL LVIII, 2452 garnemenz." | Et cil respont: _ "Tot a vostre
CL LIX, 2516 _ de Dieu de paradis." | Respont Guillelmes: _ "Et ge
CL LX, 2605 _ que requeïstes hier." | Respont Bertran: _ ".c. merciz
CL LXII, 2644 _ est touz desheritez." | Respont Bertran: _ "Quar le
CL LXII, 2648 _ plain pié de l'erité." | Respont Guillelmes: _ "Tot ce
CN XXXIII, 889 ta loi don es né | Et cil respont _ ja orroiz verité |
CN XXXIV, 909 estres de la vile | Et cil respont _ ce vos sai ge bien
CN XLVI, 1144 _ au ponz d'or reluisant | Respont Otrans _ bien vos est
CN XLIX, 1272 maill m'aportez | Et cil respont _ si con vos
PO LIX, 1736 nel me celer tu mie | Et cil respont _ com chevalier
Le sens de ces exemples, et des chiffres qui en constituent une première tentative danalyse approximative, reste à discerner. Toutefois, bien que le corpus soit trop petit pour tirer des conclusions au sujet de la centaine de poèmes constituant le genre dans son ensemble et que nous ne puissions distinguer traits traditionnels de caractéristiques de poèmes particuliers, les faits nous invitent à interroger dautres poèmes à leur lumière. Si, par exemple, il est peu probable que dire se voie dépasser en fréquence par un autre verbe de discours dans quelque texte que ce soit, le cas nest pas aussi évident pour respondre. Il nest pas exclu quen cernant des chiffres comme les nôtres nous discernions quelques traits particuliers à des poèmes individuels. Quel sens attribuer, par exemple, à la distribution des 23 occurrences de Et cil respont (singulier et pluriel) ? Sur les 77 occurrences de respondre dans notre corpus, seules 6 figurent dans la Prise, et cela malgré limportance du dialogue dans le poème. (Comparer les chiffres pour les verbes de discours dans leur ensemble : CL 297, CN 222, PO 230.)
Récapitulons donc les faits relevés. Le verbe parler, à part deux occurrences dans la formule inchoative et un emploi thématique dans la Prise, ne semble pas participer à des formulations dutilité métrique accusée. Araisnier figure dans des formulations stéréotypées, dont la formule inchoative ; nous discernons un type en six syllabes, len a aresoné, qui a son équivalent en quatre syllabes bâti sur le verbe apeler, Il len apele ; dans les deux cas, il conviendra détablir les variations rythmiques pour donner un sens aux chiffres. Nous reconnaissons deux formulations construites avec respondre au premier hémistiche, Et cil respont et Respont + sujet en deux syllabes, dont les distributions invitent à réfléchir. Certes, ces constatations sont de portée restreinte, mais la complexité du phénomène de la fréquence lexicale exige que nous cernions les faits dans leur détail avant de nous livrer aux apparences de la certitude mathématique.
Appendice : Requêtes définissant les mots et expressions étudiés
Le logiciel Tact permet dincorporer à la base textuelle les requêtes définissant les critères de recherches aussi bien que les résultats, appelés groupes, de ces recherches. La requête, telle que nous nous en servons, est ainsi la formalisation dune recherche ; les requêtes suivantes constituent la documentation des recherches effectués pour arriver à nos résultats. Voici, de manière très sommaire, les éléments de syntaxe utilisés.
Le premier élément est le nom donné à la requête et au groupe qui enregistre les résultats. Le préfixe @ indique quun élément est un groupe et non pas une forme figurant dans le texte. Le point représente nimporte quel caractère, et lastérisque signifie que nimporte quel nombre doccurrences (y compris zéro) du caractère précédent satisfera aux critères de la recherche. Les crochets entourent un ensemble de caractères pouvant tous occuper une position dans le mot. Le trait dunion indique lexclusion doccurrences. La ligne verticale indique la succession immédiate de formes. Le symbole > indique le premier élément à chercher.
vbdiscours @apeler, @araisnier, @demander, @dire, @escrier, @parler, @respondre, @huchier
apeler apel.*
araisnier araisoné, areson.*, aresn.*
demander demand.*, demant
dire didire, die, dïent, dies, dir.*, di[sz], disant, disoit, dist, dit[es]*
didire di -@dijour
dijour le | tierz | >di
escrier escri[aei].*
huchier hui*chier
parler parl.*, parolent
respondre respon.*
2parlezfolie parle[sz] & (@dfolie, beffes, pardon, neant) (* même hémistiche *)
·d·folie fol, @folage, folement, @foletez, folie, foloiement
folage folai*ge
foletez foletez*
2parlerinchoat (@prendre, @commencer) & @vbdiscours (* même hémistiche *)
commencer co[mn]menc.* -(commençaille, commencement)
prendre pr[ae]ignes*, preïs.*, pren, prendr.*, prenez, prennent, pren[tz], prise -@prise·proisier, @pris··prendre, prist, pristrent, prit
prise·proisier ne | >prise | un | seul | denier
pris·prix (de, te) | >pris, grant | >pris, de | haut | >pris, ne | >pris | je | mie
pris··prendre pris -@pris·prix
1etcilrespont et | (il, cil) | >respont
1etcilrespon2 et | (il, cil) | >(respont, responn*ent)
1respontx2 @1respontx1, @1respontlix
1respontlix respont | li | (enfes, @cuens, @roi, @turc)
1respontx1 respont | (@guillaume, @corsolt, @bertrand, @aliaume, @otran)
aliaume al[ei]aumes*
bertrand bertrans*
corsolt corsol[tz], corsut, corsuls
cuens [cq]uens
guillaume guillaume, guillelmes*
otran otran[stz]*
roi ro[iy]s*
turc tur[cs]*
Références
Gougenheim, G., R. Michéa, P. Rivenc, et A. Sauvageot (1964). Lélaboration du français fondamental. Paris: Didier.
Heinemann, Edward A. (1993). LArt métrique de la chanson de geste, Essai sur la musicalité du récit. Pub. Romanes et Françaises, 205. Genève: Droz.
Lepage, Yvan G., éd (1978). Les Rédactions en vers du Couronnement de Louis. Textes Littéraires Français, 261. Paris, Genève: Droz.
Lord, Albert B. (1960). The Singer of Tales. Harvard Studies in Comparative Literature, 24. Cambridge, Massachusetts: Harvard Univ. Press.
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