Les messages de vœux des présidents de la Cinquième République : L’ethos, la diachronie, deux facteurs de la variation lexicométrique Jean-Marc Leblanc CEDITEC, Université Paris 12, leblanc.jeanmac@free.fr Discours
éminemment politiques[1],
les messages de vœux télévisés et radiodiffusés, ritualisés par le général de
Gaulle, constituent pour le chef de l’État un moment privilégié lors duquel il
s’adresse aux Français en toute légitimité. Nul besoin en effet de quelque
événement particulier, le 31 décembre est le rendez-vous traditionnel du
président et de ses concitoyens. Valéry Giscard d’Estaing le rappelle dans son
intervention du 31 décembre 1980 : Mes chères
Françaises et mes chers Français, Ce soir est
une fête pour la plupart d’entre vous. Je ne l’oublie pas. Vous ne souhaitez
pas qu’on ravive vos soucis. Mais c’est aussi un de ces instants - bien rares
en vérité - où je peux m’adresser à vous sans être tenu par un sujet
particulier. Le
statut du président de la République, confère à ces allocutions un caractère
particulier, à la fois solennel et familier, porté par la mise en scène
télévisuelle. La démarche
lexicométrique apporte quelque lumière sur l’évolution de ces “ vœux aux
Français ” sous la cinquième République, et montre en quoi ces discours,
malgré la stabilité apparente de la forme, révèlent des ethos singulièrement
contrastés et des conceptions souvent différentes de la fonction
présidentielle. Les
“ morceaux choisis ” que nous produisons ci-après fournissent un
exemple de l’appropriation de ce passage obligé par les présidents successifs. Tableau 1 : Les incipit de la première intervention de chaque
président : De Gaulle, 31 décembre 1959
Pour la métropole française, pour l’Algérie, pour la
communauté, je forme des voeux ardents et confiants au premier jour de 1960. Je
suis rempli de l’espoir que cette année nous sera propice, parce que nous avons
fait beaucoup au cours de celle qui finit. En France même, nos institutions assurent à l’Etat
l’efficacité et l’autorité qui lui permettent d’agir. Il en sera ainsi,
désormais. Nos finances sont en équilibre et le resteront demain. Au point de
vue des ressources, de la technique, de la recherche, du crédit, des échanges
et de la monnaie, notre industrie, notre agriculture, notre commerce, disposent
d’une bonne base pour l’expansion et le progrès qui vont marquer 1960. Le franc
nouveau est le signe de cette féconde solidité. Dans les domaines politique,
social, scolaire, etc., le pouvoir fera tout pour qu’aux querelles d’autrefois
succèdent la concorde et la coopération entre les familles spirituelles, les
catégories, les citoyens de la nation française. Pompidou, 31 décembre 1969
En cette soirée du 31
décembre où chacun s’apprête à fêter le nouvel An, ma première pensée va à tous
ceux qui ne pourront participer à la joie générale, ceux que frappe le malheur,
un deuil, la maladie, la vieillesse ou, simplement, la pauvreté. Ne les oublions pas et que chacun de nous fasse, s’il
le peut quelque chose pour les aider. A eux et à vous, je dis ce soir, avec
tout mon coeur d’homme et de Français : “ Bonne année. ” Que l970 vous apporte ce
que vous souhaitez, santé, bonheur familial, succès dans vos études ou dans
votre travail, et pour notre peuple, pour tous les peuples, ce bien suprême
qu’est la paix. Que l970 soit aussi,
pour notre pays, l’année du renouveau. Qu’après les secousses subies, les
périls une fois encore surmontés, nous poursuivions dans le calme notre effort
vers le progrès, vers le bien-être, vers la justice. Valéry Giscard d’Estaing, 31 décembre 1974
Bonne année pour chacune
de vous, bonne année pour chacun de vous. Il est près de 8 heures
et vous vous préparez sans doute à célébrer la fin de l’année avec votre
famille, avec vos amis et peut-être aussi, quelques-uns, dans la solitude.
Pendant les quelques minutes où je vais vous parler, je ne voudrais ni vous
ennuyer ni vous attrister. Ni vous ennuyer en vous présentant les actions à
conduire dans la politique française, actions que je vous ai déjà décrites et
dont j’aurai l’occasion de vous parler à nouveau le mois prochain, ni vous
attrister en vous rappelant les difficultés et les risques réels du monde dans
lequel nous vivons et dans lequel nous allons vivre l’an prochain. Je voudrais que mes
voeux soient vraiment des voeux, les voeux de la France pour les Français et
les voeux des Français pour la France. Mitterrand, 31 décembre 1981 Françaises, Français de Métropole et d’Outre-mer, Je vous souhaite une
bonne année et je souhaite, en votre nom, bonne année à la France! Seule l’Histoire pourra
dire, avec le recul du temps, la trace laissée par l’année qui s’achève ; mais,
chacun sait déjà que 1981 aura été l’année du changement que la France a voulu
et que son peuple, le 10 mai, m’a chargé de conduire, avec le concours du
Gouvernement de la République et de l’Assemblée Nationale issue des dernières
élections. Je vous
avais promis d’entreprendre aussitôt les réformes qui permettraient ce
changement. Nous l’avons fait. Le Gouvernement a proposé, et le Parlement a
voté les nationalisations dont le pays avait besoin pour mener à bien sa
politique économique. Je vous avais promis de
réduire la domination de l’État sur les individus, sur les collectivités
locales, communes, départements, régions. Dans le respect de l’unité de la
Nation, vous disposerez du pouvoir et du droit à la différence, à la
responsabilité, vous gérerez plus largement vos propres affaires et vous ne
verrez plus l’administration régenter de Paris votre vie quotidienne. Chirac, 31 décembre 1995
Mes Chers Compatriotes, Vous m’avez élu, en mai dernier, pour que nous
construisions ensemble une nouvelle France, une France juste, unie,
respectueuse de notre pacte républicain. Une France telle que vous et moi la
voulons. Je mets toutes mes forces au service de cette ambition
qui est aussi celle du Premier Ministre, auquel je tiens à rendre hommage pour
l’action courageuse qu’il a menée avec détermination dans des circonstances
particulièrement difficiles. Cette ambition est celle du Gouvernement tout
entier. Depuis sept mois, notre priorité, c’est l’emploi. C’est
au nom de l’emploi que nous remettons nos finances publiques en ordre, afin de
construire une économie créatrice de travail et de richesses. C’est au nom de
l’emploi que nous menons une lutte sans merci contre le chômage de longue
durée, grâce au contrat initiative emploi. C’est au nom de l’emploi que nous
aidons les artisans et les petites et moyennes entreprises, à se développer. Présentation du corpus L’ensemble
des allocutions des présidents de la République, réunies en corpus, compte
41125 occurrences pour 5203 formes[2].
Ces discours
produits en des situations énonciatives quasi identiques assurent au corpus une
homogénéité forte qui permet d’observer l’évolution des prestations ponctuelles
mais aussi d’examiner en diachronie l’ensemble de la période. Ce corpus
relève d’un genre discursif particulier, lié au style épidictique. Bien que la
périodicité soit nécessairement espacée - une seule et unique allocution par
année - nous disposons d’une période assez longue pour dégager des phénomènes
tendanciels. Il convient
ainsi de prendre en considération les différents niveaux de phénomènes
observables, qui nous fourniront des hypothèses interprétatives. - Certains
emplois lexicaux relèvent de la personnalité des locuteurs. - D’autres
sont propres au genre discursif. - Il est
probable également que l’événementiel, mais aussi un revirement plus ou moins
brutal dans les choix de communication d’un locuteur aient une incidence non
négligeable. - Enfin,
d’autres faits sont liés à des modifications plus profondes du discours
politique sur l’ensemble de la période. Ces discours
forment par ailleurs une série textuelle chronologique[3]. Nous
avons soumis ce corpus à un ensemble d’analyses lexicométriques désormais
classiques, le dotant des partitions par locuteur et par année sur l’ensemble
du corpus et pour chaque sous partie[4].
Nous produisons ci-dessous les principales caractéristiques de la partition
locuteur.
Tableau 2 :
Principales caractéristiques de la partition locuteur
Ces
données quantitatives appellent quelques remarques. Le matériau est beaucoup
plus riche pour de Gaulle et Mitterrand que pour les autres locuteurs, les cinq
présidents n’ayant pas assumé leur charge sur les mêmes durées[5]. Nous
disposons ainsi de 14 discours pour Mitterrand, dix pour de Gaulle, sept pour
Giscard d’Estaing et Chirac et cinq pour Pompidou. Ceci
explique évidemment pour une large part la relative disparité du volume des
sous parties. Les longueurs respectives des messages comportent également
quelques inégalités. De Gaulle et Chirac consacrent en moyenne 1150 et 1245
occurrences à leurs discours alors que Mitterrand et Giscard d’Estaing ne leur
accordent que 856 et 866 occurrences. Enfin, les messages de Pompidou sont les
plus courts avec 570 occurrences. Ces données restent cependant comparables et
autorisent des conclusions fiables. Affinités et contradictions lexicales L’analyse
factorielle réalisée selon la partition locuteur caractérise les grandes
oppositions du corpus et tend à indiquer quelques pistes de recherche.
Tableau
4 : A.F.C du corpus vœux selon la partition locuteur. Axe 1 : 34%. Axe 2 : 26%. Sur le deuxième axe, un clivage essentiellement diachronique
oppose le lexique des trois premiers présidents aux deux derniers. Sur le
premier axe, de Gaulle s’oppose à l’ensemble de ses successeurs. On observe par
ailleurs des proximités entre Giscard et Pompidou d’une part et Mitterrand
Chirac par ailleurs, dont on peut penser qu’elles sont dues en partie à la
chronologie et à l’événementiel, d’autant que l’opposition la plus forte,
matérialisée par la diagonale de l’analyse factorielle réside entre de Gaulle
et les deux derniers présidents de la République. La représentation factorielle ne laisse en rien présager
d’une quelconque affinité entre de Gaulle et Mitterrand, à qui l’on prête
souvent volontiers quelques analogies dans leur façon de concevoir la fonction
et quelques traits communs dans leur vision de la France[6].
A cela plusieurs explications peuvent être avancées. D’une part vingt trois
années séparent la première intervention du général de Gaulle de celle de
François Mitterrand. Il est donc probable que les usages lexicaux aient subi
une importante mutation au cours de cette période. D’autre part l’analyse
factorielle met en évidence les seules oppositions relevant de la distribution
du stock lexical. C’est pourquoi il convient de pousser plus avant l’analyse
avant de tirer des conclusions que pourrait inspirer une interprétation hâtive
de la configuration de la représentation factorielle. Celle-ci n’en a pas moins
le mérite de susciter des interrogations, d’orienter l’analyse. Nous avons montré lors d’une précédente étude[7]
une quasi-absence de verbes d’action, de jugement, de volitifs ou de modalités
appréciatives associés à la première personne du singulier chez de Gaulle. Sous cet aspect se produit un glissement du je
vers nous et la France. Ainsi, la France, sujet ou
complément d’agent réussit, sait ce qu’elle veut, ce qu’elle doit aux
autres, veut continuer son action, ne se laissera pas intimider, la France
entend contribuer à la réforme, entend que se terminent, est résolue à
poursuivre l’œuvre immense, parce qu’elle est la France, doit mener au milieu
du monde une politique qui soit mondiale. La présence de ces verbes volitifs et d’opinion produit
un effet de personnification de la France, qui s’explique assez bien par une
manière de synecdoque qui serait la représentation du peuple par le pays. La
personnification est plus nette encore lorsque de Gaulle évoque la France et
ses enfants. (La France protégera ses enfants.). Lorsque France se trouve sujet d’un
volitif, il y a un effet d’effacement de la personnalité derrière la fonction.
C’est un des faits marquants qui rapproche de Gaulle de Mitterrand, bien que ce
dernier compense par une forte personnalisation du discours. (Je veux, je
refuse, j’ai demandé,…) personnalisation que l’on retrouve chez J. Chirac. Chez Mitterrand la France a voulu, a
lancé au monde, agit, appliquera, aura à ratifier, joue un rôle, présidera,
s’est fixé un rendez-vous, sait, travaille… On le voit, la
distribution lexicale ne peut se substituer à un examen plus approfondi des
faits liés à l’énonciation et à la syntaxe, de même que les données
statistiques ne sauraient dispenser d’un retour au texte. Néanmoins, l’analyse
lexicométrique permet de déceler des faits qui ne seraient pas nécessairement
apparus à la seule lecture du texte. L’originalité Gaullienne ? La position
particulière qu’occupe le général de Gaulle sur la représentation factorielle
soulève quelques questions. On peut se demander s’il n’est pas plus proche
discursivement et lexicalement des pratiques de la quatrième République. Pour
tenter de répondre à cette interrogation, nous avons, à titre expérimental,
intégré les seuls messages de vœux existants des présidents de la Quatrième
République[8].
(Vincent Auriol, décembre 1946, 1948, 1953). Étonnamment ces discours se
placeraient au voisinage de Pompidou et Giscard, de Gaulle conservant la singularité
qu’on a pu observer. Ainsi, la chronologie et l’événementiel ne seraient pas
les seuls facteurs explicatifs de ce phénomène. S’agit-il alors d’une
opposition relevant de registres personnels ? Il est probable que la
personnalité des locuteurs soit pour beaucoup dans la configuration de
l’analyse factorielle. Une seconde A.F.C, réalisée selon la partition année
conforte cette hypothèse. Tableau
5 :A.F.C du corpus vœux selon la partition année. Points superposés :93(88), 90(83), 62(60). Axe 1 :6%. Axe 2 :4%. De cette
deuxième représentation on retiendra la configuration remarquable de l’A.F.C où
la disposition des années permet d’identifier aisément les locuteurs.
L’ensemble des interventions du général de Gaulle se trouve regroupé dans une
zone restreinte du plan, en marge de toutes les autres années du corpus. Il en
ressort que son discours est à la fois très différent des autres dans le
lexique et très stable d’une année sur l’autre. La faible dispersion des années
96-2001 et 81-95 nous conduit à établir une conclusion identique : Bien
que proches l’un de l’autre, les deux derniers présidents affichent une grande
stabilité lexicale. Le constat est quelque peu différent pour Giscard et
Pompidou. L’amplitude est beaucoup plus importante. On y verra peut-être la
volonté novatrice de Giscard dans sa stratégie de communication et la recherche
de compromis de Pompidou, entre rupture et continuité, fidélité au général de
Gaulle et volonté de renouvellement. Si la première
représentation illustre les affinités et divergences des locuteurs, la seconde
souligne la grande stabilité des présidents, plus particulièrement de Gaulle,
Mitterrand et Chirac. Au-delà de l’aspect chronologique, les A.F.C semblent
mettre en évidence des oppositions de registres personnels. Analyse factorielle et temps lexical. La diachronie
semble cependant constituer un facteur déterminant de ces représentations
factorielles. L’A.F.C sur les locuteurs en particulier représente leur
succession selon l’ordre chronologique (si l’expérience menée sur les discours
de Vincent Auriol n'avaient pas en partie infirmé ces observations). Pour
autant, ces représentations ne reproduisent pas précisément le modèle de
l’effet Guttman relatif au phénomène de temps lexical décrit par A. Salem[9].
En effet, d’après ce phénomène de temps lexical, si le seul facteur de
modification du lexique était le temps, les points portés sur les deux axes
factoriels seraient ordonnés selon une courbe idéale, incurvée en son centre.
Ainsi, les années ou périodes contiguës seraient proches sur le graphique. Le
facteur chronologique est pourtant nettement visible. A cela plusieurs
explications. Les messages
sont relativement courts, ce qui rend difficile l’émergence de faits liés à la
chronologie, en particulier sur la partition année. De plus, bien que les
conditions d’énonciation soient quasiment identiques, on ne peut considérer
qu’on est en présence d’un locuteur collectif mais bien d’une succession de
locuteurs. Il est donc probable que les ethos différents viennent brouiller le
phénomène chronologique. Notons par ailleurs que bien que la périodicité soit
régulière, le corpus se place plutôt dans la ponctualité que dans la
continuité. L’espace d’une année entre chaque message fait probablement perdre
en partie les effets d’un phénomène chronologique. Il convient
donc d’interpréter ces analyses factorielles à la fois de manière
traditionnelle, comme opposition dans les usages lexicaux, tout en tenant
compte de la chronologie. A titre d’expérience nous avons tenté de grouper les
messages sous une même partition, par deux trois ou quatre. Ceci avait pour
finalité d’atténuer l’effet locuteur et de pallier la faible longueur des
discours, sans résultat notable cependant. Des ethos fortement contrastés - Spécificités des marques énonciatives La
personnalité des locuteurs transparaît de plus nettement au travers de profils
énonciatifs très contrastés. Le tableau qui suit synthétise la répartition des
emplois des pronoms personnels et adjectifs possessifs en termes de
spécificités.
Tableau 6 :
Spécificités des pronoms personnels et adjectifs possessifs. Guide de lecture La méthode des spécificités permet de repérer les formes sur-employées, ainsi que les formes sous-employées par chacune des parties d'un corpus et de porter un jugement sur chacune des cases du tableau prise isolément. Ce jugement en probabilité sur la fréquence fij de la forme i dans la partie j s'appuie sur la comparaison de quatre nombres qui sont: T — le nombre des occurrences du corpus; tj — le nombre des occurrences de la partie j; Fi — la fréquence de la forme i dans le corpus; fij — la fréquence de la forme i dans la partie j On commence par fixer arbitrairement un seuil de significativité s. On calcule ensuite, à l'aide d'un modèle probabiliste dit modèle hypergéométrique, la probabilité Pinf(fij) attachée à l'apparition d'au plus fij objets marqués, lors du tirage au hasard sans remise d'un échantillon de longueur t du sein d'un ensemble comportant T objets dont Fi sont marqués. La probabilité Psup(fij) est attachée à l'apparition lors d'un tirage du même type d'au moins fij objets marqués. Si la première de ces probabilités se révèle inférieure au seuil retenu, on conclura que la forme i est peu attestée dans la partie j par rapport à ce que le modèle hypergéométrique laissait prévoir et on dira que la forme i est spécifique négative ( S-) pour la partie j. Si c'est, au contraire la seconde de ces probabilités qui se révèle inférieure au seuil s, on conclura que la forme i est plutôt abondante dans la partie j. On dira que la forme i est spécifique positive (S+) pour la partie considérée. Si aucune des deux probabilités ne se révèle inférieure au seuil s, on dira dans ce cas que la forme i est banale (b) pour la partie j. Les diagnostics ainsi obtenus sur chacune des sous-fréquences figurant dans le tableau peuvent être ensuite réordonnés pour permettre différents types de lecture. Les exposants indiquent un diagnostic de spécificité en termes de sur-emploi (+ ) ou du sous-emploi (-) de chaque forme, calculé pour chaque locuteur par rapport à la totalité du corpus. L’absence d’exposant indique que l’usage ne présente pas de caractéristique remarquable, l’emploi est considéré comme “ banal ”. Le discours du général de Gaulle est caractérisé par un
évitement des marques de la première personne du singulier et de la seconde du
pluriel, la prise en charge de l’énoncé étant assurée par un nous dont
le référent est essentiellement la France. A l’opposé, Giscard d’Estaing multiplie
les marques énonciatives en direction des Français (vous + 20) tout en
personnalisant le discours par un usage fort de la première personne du
singulier (je +5) et en sous employant la première du pluriel (nous
–2). Pompidou s’inscrit dans un schéma énonciatif analogue. François
Mitterrand privilégie les marques de la première personne du singulier (je
+2, mes +3, moi +2), usant très peu en revanche des marques de la
première du pluriel (nous –4, notre –5). L’emploi le plus
remarquable est sans doute la spécificité du pronom indéfini (on +10), tenant pour une large
part d’une volonté de connivence avec les Français (énoncés à tournures
familières) mais aussi révélateur d’un procédé argumentatif cher au chef de
l’Etat (implicite, non-dit, attaques, ripostes, désignation d’adversaires ou
d’opposants). Dans le
discours de Jacques Chirac, le faible usage de la première du singulier
s’oppose à une plus forte représentation des marques de la première du pluriel.
A travers les
marques énonciatives, le discours construit une représentation de l’énonciateur
mais aussi de l’interlocuteur. Ces profils énonciatifs extrêmement diversifiés
sont autant d’indices sur la conception de la fonction présidentielle des
locuteurs, sur leur vision des Français mais aussi sur la façon dont ils
conçoivent les messages de vœux. La
représentation factorielle qui suit synthétise le système énonciatif adopté
dans ces messages. Il serait en l’espèce plus exact de préciser qu’il s’agit là
de la part la plus manifeste des faits liés à l’énonciation auxquels il
conviendrait d’ajouter un examen attentif des modalités, de l’adverbialité, de
la temporalité et de l’ensemble des traces inscrivant le locuteur dans son
discours. Cette représentation factorielle est réalisée, non plus à d’après le
tableau lexical entier ou un sous-tableau comprenant l’ensemble des formes
graphiques et segments répétés jusqu’à la fréquence 5 mais à partir d’une liste
des pronoms personnels et adjectifs possessifs les plus représentatifs.
Cette représentation
une manière de “ panorama énonciatif ” du corpus et souligne les
clivages extrêmement marqués qui opposent les locuteurs. On y observe
une répartition fortement structurée des marques personnelles. Exceptées les
marques de la troisième personne qui se répartissent sur l’ensemble du plan, la
seconde du plurielle est uniquement représentée dans le plan supérieur gauche
du graphique s’opposant aux marques de la première personne, (demi plan
inférieur), au singulier à gauche, au pluriel à droite. Chaque position
énonciative est ainsi nettement marquée, l’échange, le rapport à
l’interlocuteur (tu et vous), l’implication personnelle du
locuteur (je) et l’inclusion (nous). Les fonctions
communicatives définies par R. Jakobson se répartissent de façon très nette, la
fonction expressive, véhiculée par les pronoms de la première personne, centrée
sur l’émetteur, réunies dans la partie inférieure du plan et la fonction
impressive mobilisant essentiellement le marques de la deuxième personne,
centrée sur le récepteur apparaissant dans le quart supérieur gauche. La
projection des locuteurs sur ce schéma énonciatif fournit de la sorte une
dimension fondamentale de l’ethos. Giscard d’Estaing, se place du côté de la
fonction impressive. La présence de la seconde personne du singulier s’explique
chez lui par de fréquentes apostrophes, parfois lyriques. Adieu donc,
1974, et salut à toi, 1975 ! Je souhaite
que tu sois une année accueillante pour les Français, que tu répondes à leur
attente, à l'attente de chacune et de chacun d'entre vous, à ses espoirs, à ses
voeux, à ses désirs, à son coeur. Pompidou,
moins caractérisé, présente un équilibre entre le je et le vous,
Mitterrand étant plus proche d’une implication personnelle et de l’indéfini.
Chirac, quant à lui se définit par une relative proximité à la fois du nous
et du je dont il n’est pas si éloigné. Comme sur les précédentes
représentations les similitudes entre Giscard et Pompidou sont ici manifestes.
Le fait marquant est bien sûr la singularité énonciative du général de Gaulle,
très excentré sur le graphique. Les positionnements énonciatifs les plus
marqués sont ceux qui opposent Giscard et de Gaulle. A ces trois grandes
tendances énonciatives correspondent trois comportements, trois ethos
différents, que l’on pourrait traduire de la façon suivante. -
de Gaulle, un discours de la distance, l’effacement de la personnalité derrière
la fonction, l’occultation de la dimension individuelle de l’interlocuteur. -
Pompidou et Giscard d’Estaing, le discours humanisé, la simplicité et la
connivence, la prise en considération des Français en tant qu’individus. -
Chirac et Mitterrand, la personnalisation du discours, l’incarnation de la
fonction. Ces
oppositions relèvent-elles uniquement de la personnalité du locuteur où
trouvent-elles également leur origine dans une modification plus profonde du
discours politique ? Registres personnels ou chronologie ? Les
spécificités chronologiques font apparaître un phénomène général qui n’est pas
simplement le fait de personnalités différentes mais témoigne d’une évolution
du discours politique, et de la conception de la fonction présidentielle. Il
semblerait qu’au fil du temps le président de la République assume son énoncé,
s’implique personnellement dans le discours. Le tableau des spécificités
évolutives de la première personne du singulier montre une tendance vers la
personnalisation du discours centrée sur le je qui ne semble pas
cependant se poursuivre chez Chirac avec la même intensité.
L’observation
des fréquences relatives de la première personne du singulier chez le dernier
président de la République affine ce constat.
Tableau 8 :
Fréquences relatives des marques de la première personne du singulier. On note une
diminution sensible des marques de la première personne du singulier (le pronom
personnel suivant globalement la même évolution que le groupe je, j’
mon, ma, mes, me, m’, mien(s), mienne(s)).
La personnalisation du discours n’a cessé de décroître sur l’ensemble de la
période considérée, malgré un pic important en 1997. Cette période coïncidant
avec le début de la cohabitation, doit-on en déduire que le chef de l’État
s’est alors personnellement impliqué dans le discours pour revenir sur les
raisons de la dissolution, pour redéfinir son rôle, se présenter comme le
garant des institutions, légitimer sa présence dans la nouvelle configuration
politique qui se présente à lui ? Etude de la chronologie Ainsi que nous
l’avons présenté en introduction, l’ampleur de la période considérée malgré la
particularité du genre discursif et l’exiguïté des messages nous permet de
dégager des tendances générales. On s’intéressera particulièrement aux formes
qui subissent une importante évolution sur une période donnée et celles qui ont
tendance à émerger ou à régresser sur l’ensemble de la période. Les A.F.C
produites précédemment, bien que fortement corrélées à la chronologie, ne nous
permettent pas de porter une appréciation sûre sur une année ou une période
particulière. On aura noté en effet que le phénomène de temps lexical
n’apparaît pas de façon nette sur ces représentations, pour les raisons que
l’on a évoquées. C’est donc à travers l’observation de plusieurs phénomènes
statistiques, s’appuyant naturellement sur des hypothèses préalables que nous
tenterons de cerner les phénomènes évolutifs. Cerner les évolutions du
vocabulaire Nous
recourrons ici à trois méthodes complémentaires qui fournissent chacune un
angle d’approche différent. - Le
coefficient de corrélation de Bravais-Pearson permet de mesurer l’évolution
d’une forme et de repérer celles qui globalement sont en progression de celles
qui ont tendance à régresser. Pour chaque mot, ce coefficient établit un
rapport entre le rang de l’élément et les valeurs de l’écart réduit. On obtient
ainsi, pour un seuil défini préalablement une liste des termes qui subissent un
accroissement ou qui au contraire sont progressivement abandonnés. Le
diagnostic s’exprime par un indice, positif ou négatif, selon que la forme
s’accroît ou diminue, la significativité étant proportionnelle à la valeur
absolue de cet indice. Nous avons
soumis notre corpus muni de la partition locuteur à ce traitement, en
considérant les termes ainsi repérés comme un premier indice d’évolution. Nous
fournissons en annexe une liste des formes les plus significatives. Nous avons
systématiquement recoupé cette première information aux autres méthodes que
nous développons ensuite, et vérifié la pertinence du calcul par la réalisation
de courbes de fréquences relatives. Plutôt que de pertinence, nous parlerons de
cohérence, de compatibilité des outils mobilisés. Les traitements que nous
décrivons succinctement ici sont en effet réalisés à l’aide de deux logiciels
de statistique lexicale différents ; Hyperbase pour la fonction
“ évolution ” utilisant le coefficient de corrélation et lexico pour
les spécificités évolutives et accroissements spécifiques. - Les
spécificités chronologiques permettent de dégager des moments particuliers
dans l’utilisation de chaque terme. Nous avons appliqué cette méthode à la
partition année. Nous examinerons plus particulièrement la liste des
spécificités majeures classées par ordre décroissant. Ceci produit une liste
des formes pour lesquelles la ventilation sur une période donnée est
particulièrement remarquable. Ce diagnostic s’applique aussi bien à une seule
année qu’à plusieurs années consécutives. - Les
accroissements spécifiques, que nous avons appliqués à la même partition
permettent à partir d’un calcul de fréquences probabilisées, de porter un
jugement sur un changement brusque dans l’utilisation d’un terme d’une période
donnée (ici une année) par rapport à l’ensemble des périodes qui précèdent.
C’est le calcul que nous avons utilisé lorsqu’il s’est agi de cerner les
évolutions des marques personnelles. L’utilisation
de ces trois méthodes procède d’une démarche expérimentale. Il nous a semblé
intéressant de profiter de cette étude sur un corpus qui nous est familier pour
nous livrer à une première comparaison, ici plutôt axée sur les phénomènes
chronologiques, des outils disponibles. Elle nous permet également d’adopter
des perspectives quelque peu différentes sur la chronologie. Nous considérons
en effet que la liste obtenue à partir du coefficient de corrélation nous
fournit une vision globale des faits chronologiques, en tout cas telle qu’elle
se présente à partir de nos propres choix de partitions et de seuil. La méthode
des spécificités chronologiques produit une vision plus affinée, puisque le
diagnostic est porté sur une ou plusieurs périodes consécutives. Enfin, les
accroissements spécifiques offrent une vision beaucoup plus ponctuelle et
précise en repérant les évolutions sur une année par rapport à l’ensemble de
celles qui précèdent. Portons donc
notre regard dans un premier temps sur la liste produite à partir du calcul de
coefficient de corrélation. Afin de ne pas en brouiller la lecture nous y avons
fait figurer les seules formes dont la fréquence excédait quatre occurrences. Les faibles
fréquences ne sont cependant pas nécessairement à négliger. Compte tenu du
volume restreint du corpus il peut s’avérer que certaines occurrences de
fréquence modeste laissent entrevoir des évolutions diachroniques reflétant les
préoccupations d’une époque. Car l’intérêt d’un tel corpus est également de
mesurer cette adéquation, de voir en quoi cette forme si codifiée s’inscrit
dans son temps, s’adapte aux courants événementiels et langagiers. Nous nous
proposons d’étudier ce phénomène lors d’une étude ultérieure. Notons cependant
le cas d’acteurs sociopolitiques tels que associations, partenaires,
syndicats, communes, dont l’émergence ne saurait être
anecdotique. Il est
intéressant de constater que parmi les toutes premières formes repérées comme
significativement évolutives figure la forme conjuguée du verbe vouloir à la
première du singulier. Ceci semblerait confirmer une tendance vers
l’implication et la personnalisation du discours, préfigurée par l’évolution
sensible des marques de la première personne du singulier. La distribution de
cette forme en fréquence relative confirme ce diagnostic. On peut dater
l’apparition de la modalité à partir de Giscard. L’emploi perdure chez
Mitterrand et connaît un net accroissement avec Chirac. Ce simple constat ne
dispense en aucune manière d’un examen attentif des faits syntaxiques. On
dispose cependant d’un faisceau de faits sur lequel étayer l’analyse. Nous
n’interpréterons pas ici de façon approfondie l’ensemble des termes de cette
liste mais voudrions montrer en quoi elle peut orienter la recherche. Les thèmes économiques Un examen
rapide semble suggérer une évolution notable vers l’accroissement d’un lexique
relatif au champ économique. Ainsi les formes croissance, chômage
et emploi(s) sont en nette augmentation tandis que reculent les formes expansion,
prospérité, développer et développement qui apparaît
cependant à un seuil bien moindre. La représentation de la distribution de ces
formes en fréquence relative confirme cette tendance. Il semblerait que les
formes croissance et emplois subissent une évolution identique,
la croissance étant dans le discours économique souvent considérée comme un
élément favorisant la création d’emplois, le pluriel étant nettement favorisé
comme le montrent les co-présences suivantes : Il faut que la croissance de notre
richesse nationale, qu'une gestion sérieuse nous permet d'entrevoir, soit en
même temps que le meilleur moyen de créer des emplois, l'occasion de
réduire les inégalités excessives de notre société, en partageant plus
justement les fruits de l'effort commun. Mitterrand,
1988 Je forme des voeux,
et le gouvernement y travaille, pour que la croissance de notre économie
qui a déjà permis de créer, en 1989, plus de 350 000 emplois fasse enfin
reculer le chômage et pour que les profits que le pays en tire soient plus
justement partagés. Mitterrand,1990. Pour 1996,
beaucoup dépend de nous. La croissance, qui crée des emplois,
sera aussi ce que nous la ferons. La croissance, c' est d'abord la
confiance, confiance en nos initiatives, confiance en nos efforts . Chirac,
1996. Cette
volonté s'inscrit dans une vision, dans une ambition, dont j'ai esquissé les
contours récemment à Berlin. L’Europe est notre nouvel horizon. et j'aurai
l'occasion de vous en reparler. Une année utile pour la France.Le travail et
les efforts des français, l'action des gouvernements successifs et la croissance
mondiale, ont provoqué un réel élan de notre économie. Parce que nous avons des
entrepreneurs audacieux, imaginatifs, parce que le savoir-faire et la qualité
des salariés français sont reconnus, la France invente, la France produit, la
France exporte, nos entreprises créent des emplois . Chirac,
2001. Oh, l'euro
n'est pas une fin en soi. Il signifiera, pour nous, plus de croissance,
plus d'emplois, plus de pouvoir d'achat, plus d'échanges, une France plus forte. Mais il doit être
avant tout un instrument au service de l’Europe des hommes que nous
construisons. Chirac,
2001. Les idéaux républicains La corrélation
chronologique semble par ailleurs souligner l’émergence d’un lexique relatif
aux valeurs républicaines, à travers les substantifs démocratie, égalité
et l’adjectif démocratique. Si la forme démocratique fait son
apparition dès les années de présidence de V.G.E, les termes démocratie
et égalité sont plus tardivement attestés. Les valeurs On notera
également la progression de valeurs telles que la solidarité (ainsi que
l’adjectif solidaire), la tolérance, le courage, la volonté
et par antonymie, l’injustice. L’usage du substantif solidarité
ne se révèle réellement qu’avec F. Mitterrand et s’accroît notablement avec J.
Chirac. L’évolution de volonté suit globalement celle de solidarité,
l’accroissement étant plus marqué pour ce dernier terme chez Chirac. Les
contextes de ces formes ne produisent pas de co-présences significatives, on
cherchera donc ailleurs l’explication de ce phénomène. La tolérance est
invoquée dès Pompidou. Sa présence est continue sur l’ensemble de la période.
Il restera à définir quelles en sont les acceptions pour les différents
locuteurs. Ce n’est qu’à partir de V.G.E que le substantif courage est
attesté, là encore l’évolution reste constante par la suite. Dénominateur
commun de ces valeurs, toutes sont absentes chez le général de Gaulle. Une
piste est à nouveau ébauchée. Thèmes ou dossiers symptomatiques d’une époque Parmi les
fréquences plus modestes, deux formes attireront notre attention, exclusion
et exclus. Un examen plus approfondi révèle un emploi exclusif des deux
derniers présidents, avec une très forte progression chez Chirac. Le substantif
sécurité est nettement plus représenté sur l’ensemble du corpus avec 34
occurrences. Présent dès les premières années, il s’accroît chez Pompidou, pour
subir un net recul chez Giscard. La forme progresse très nettement chez
Mitterrand et Chirac. Les acceptions en sont cependant très différentes. De
Gaulle, mais plus encore Mitterrand l’emploient dans le cadre de la politique
extérieure dans le sens de sécurité nationale. Ainsi avons-nous pu renforcer notre sécurité
et celle du monde libre en commençant à nous doter d'une défense nationale
moderne. de Gaulle, 1962. C'est parce que nous sommes redevenus
depuis dix ans, après une longue période pendant laquelle le malheur alternait
avec l'inconsistance, que nous nous trouvons en mesure d'agir efficacement pour
aider à la solution des problèmes aigus de l'univers. Lesquels? Chacun peut les
énumérer. Il s'agit: Soit de la détente et de la coopération à pratiquer […];
soit de l'affreux conflit vietnamien auquel peuvent mettre un terme des
négociations à paris; soit de l'issue internationale du drame du moyen -
orient, issue déjà tracée mais qu'il faut absolument mettre en oeuvre - ce dont
les grandes puissances ont les moyens - par l'évacuation des territoires
conquis de force, la garantie accordée à chaque camp quant à ses justes
frontières et à sa sécurité […]. de Gaulle,1969. Mais le choix qui est le nôtre, c'est la
paix, c' est le désarmement, c'est la sécurité collective. Pour que la
paix l'emporte, et elle doit l'emporter, il faut que se maintienne l'équilibre
des forces entre les deux puissances qui dominent le monde. Mitterrand,1982. Quoi qu'il en soit, nous ne laisserons à
personne le soin d'assurer à notre place notre sécurité et notre
indépendance. Mitterrand, 1983. La deuxième étape reste à inventer à
partir des accords d'Helsinki, je compte voir naître dans les années 90 une
confédération européenne au vrai sens du terme, qui associera tous les états de
notre continent dans une association commune et permanente d'échanges, de paix
et de sécurité. Mitterrand, 1989. En 1972
apparaît pour la première fois la notion de sécurité intérieure, associée à
l’ordre et à la paix civile. Il est intéressant de constater qu’on ne retrouve
l’association ordre et sécurité que bien plus tard, chez J. Chirac. L’État est là pour défendre le droit,
pour assurer l'ordre et la sécurité sur l' ensemble du territoire. Chirac, 1996. J'appelle chacun à prendre ses
responsabilités. Que les citoyens respectent leurs devoirs. Que les pouvoirs
publics restaurent l'ordre et la sécurité, qui est la première des
libertés. Chirac, 1997. Chez
Mitterrand, outre l’aspect international, invoqué également au sein des
segments conseil de sécurité, en 1990 et 1992, la forme sécurité
apparaît au sein du syntagme sécurité sociale, en 1981 et 1995. La sécurité
intérieure est évoquée en 1981 dans le cadre de mesures prises pour le
renforcement des forces de police et en tant que dossier à part entière en 1983
et 1984. Mais, nous avons en même temps renforcé
votre sécurité : 5 à 6 000 gardiens de la paix, 2 500 gendarmes
actuellement recrutés, iront grossir les rangs de la force publique et veiller
à la tranquillité des villes et des campagnes. Mitterrand, 1981. Mes chers compatriotes, voilà pour nous
de grandes tâches. Sans oublier les autres : plus de sécurité, des
banlieues rénovées, et plus d'enfants dans nos familles. En dépit de leurs
divergences, je ne me lasserai jamais d'espérer - ni de vouloir - que les
français s'unissent quand il s'agit de l'essentiel. Mitterrand, 1983. Chez Chirac,
le substantif sécurité est sémantiquement uniforme. Exceptée une unique
occurrence de sécurité alimentaire, l’ensemble des apparitions concerne
le même sujet. A deux reprises, le chef de l’État associe ordre et sécurité, en
1996 et 1997. Il évoque la sécurité des biens et des personnes en 1999
comme une des priorités de l’Etat. Il l’associe à la notion de liberté cette
même année, l’évoque en tant que dossier en 1999, 2000, 2001 et l’associe pour
la première fois à la violence cette dernière année. Notons que le terme
d’insécurité n’apparaît que trois fois sur l’ensemble du corpus, une fois même
chez Pompidou. Il semblerait donc que cette notion soit passée sous silence
dans les vœux des derniers présidents alors qu’il est manifeste que ce thème
est abondamment évoqué sous la dénomination d’insécurité en d’autres
circonstances mais aussi dans le discours gouvernemental. Préoccupations nouvelles L’Environnement,
et la mondialisation, de fréquences assez faibles se trouvent dans les
seuls discours de J. Chirac. Ici, l’événementiel joue un rôle important. La
forme planète apparaît chez Giscard et Mitterrand dans une acception qui
ne relève en rien des préoccupations environnementales qu’affiche Chirac
puisque celui-ci n’emploie cette forme que dans ce strict cadre. Probablement le candidat à
l’élection présidentielle se dessine-t-il derrière le chef d’État, d’autant que
ces formes apparaissent plus particulièrement en 2001. Le thème de
l’environnement est par ailleurs un dossier qui prend de l’importance plus
particulièrement depuis ces toutes dernières années. Homme, femmes, chers compatriotes, un rapport différent
aux Français Parmi les
formes que cette première approche chronologique met en exergue, les mots chers
et compatriotes témoignent d’une évolution dans la manière de s’adresser
aux Français. Cette formule, adoptée par Mitterrand, reprise par Chirac, se
substitue au très solennel Françaises, Français du général de Gaulle.
Pompidou et V.G.E ont réduit la distance avec leurs interlocuteurs, tantôt
s’adressant à leurs chers Français, à leurs amis. Parmi les
termes significatifs, une notion nouvelle semble s’imposer, celle du choix et
du dialogue. La forme dialogue subit une forte progression sur la
période Giscard Chirac, totalement absente chez les deux premiers présidents. Là encore les
contextes d’apparition en sont très différents selon les locuteurs. Pour V.G.E
il s’agit exclusivement de politique internationale et du dialogue Nord-Sud.
(Deux occurrences). Pour Mitterrand le dialogue est également avant tout
affaire de politique étrangère. Il emploie néanmoins cette forme en 1983 et en
1994 dans le cadre de la politique intérieure. Et comme l’État entend réaliser en 1985
le nécessaire allégement des impôts et des charges, c' est ainsi et pas
autrement que nous relancerons l'activité économique, que nous créerons des
emplois durables, que nous revaloriserons le pouvoir d'achat des salaires et
que nous ferons de la France un grand pays moderne. A condition, évidemment,
qu'une politique sociale de solidarité et de dialogue inspire et
accompagne la politique économique. Mitterrand, 1983. Mais on n'y parviendra que si employeurs
et salariés parlent entre eux, que s'ils engagent le dialogue, que si le
gouvernement les y encourage, qui si tous se décident à négocier ensemble des
choses de leur vie. Mitterrand, 1994. Chez Chirac en
revanche, le dialogue n’est invoqué que pour louer les valeurs de tolérance, de
compréhension nécessaires à l’entente et l’unité nationale. C'est tous ensemble que nous devons retrouver
les voies du dialogue. Le progrès social en dépend. […] Il faut surtout
que nous apprenions à nous écouter davantage. J' appelle chacun à prendre toute
sa part de ce dialogue dont dépend notre capacité à nous réformer. Chirac, 1995. Nous devons construire une société où
l'on se parle. Une France apaisée, c'est une France qui dialogue. Chirac, 1997. Il n'y a pas de dialogue social
sans respect de l'autre. Chirac, 1997. Figurant Parmi
les premiers rangs, la forme chance, d’une fréquence non négligeable (20
occurrences) progresse très sensiblement sur l’ensemble de la période. Pour V.G.E, la
chance garde le caractère intimiste de ses messages. Il s’agit d’évoquer ceux
qui n’ont pas la chance d’être en famille (1976, 1979). Chez de Gaulle, c’est
exclusivement à travers les rapports entre la France et l’Algérie qu’il évoque
cette notion comme une chance pour l’Algérie, (1961, 1962). Chez François
Mitterrand, c’est une manière d’apologie de la France qui prédomine. Ainsi en
1985 et en 1989 nous avons la chance de vivre dans un pays comme le nôtre,
en 1991 la chance de vivre en paix, en 1994 d’être épargnés par
le malheur, mais aussi, en 1994 d’être écoutés. Parmi les mesures qui
sont pour lui nécessaires, il évoque par ailleurs en 1988 sa volonté de faire
en sorte que chacun ait la chance de s’instruire. Enfin, il présente en
1983 une échéance européenne comme une chance que la France ne veut pas
rater. Chez Chirac,
le sémantisme en est plus diversifié. Il évoque en 1998 et à deux reprises en
2001, l’euro comme une chance pour la France ou pour l’avenir. En 1996,
évoquant les mesures qu’il juge nécessaires en matière de formation, il affirme
l’obligation de donner leur chance aux jeunes, insistant l’année
suivante, sur ce même volet, sur la chance pour la France et les jeunes que notre
pays soit le plus jeune d’Europe. Parmi les mesures qu’il envisage, il les
présente comme une chance qu’il faut donner à la société. Enfin, de façon plus
intimiste, il évoque ceux qui ont la chance d’être ensemble ou en famille. Parmi les
formes repérées comme subissant une progression significative, les mots homme
et femmes méritent quelque attention. D’une part parce que l’opposition
singulier pluriel n’est probablement pas indifférente. D’autre part parce qu’à
l’accroissement de femmes correspond le recul de Françaises,
abstraction faite des discours du général de Gaulle et de la formule d’adresse Françaises
Français. Également parce que femmes apparaît essentiellement en
cooccurrence avec hommes et que cette forme n’est pas significativement
en progression sur la période. Enfin notons que si le singulier homme
progresse notablement, le substantif femme n’est pas attesté. Ainsi,
incidence de l’événementiel, prise en considération de l’individualité des
Français, avancée vers la parité, voici quelques hypothèses vers lesquelles
l’observation des phénomènes chronologiques peut nous conduire. L’événementiel
est assez peu représenté. L’Algérie par exemple ne figure que parmi les
dernières formes notées comme régressant sur la période. On s’étonnera par
ailleurs de ne trouver Europe et euro qu’en appliquant un seuil
très inférieur à celui que nous avons adopté pour la liste que nous produisons
en annexe. Il semblerait que des faits, peut-être plus fins, ou dont
l’évolution est plus tardive aient échappé à ce premier traitement. Les
accroissements spécifiques ainsi que les spécificités évolutives mettent en
évidence d’autres phénomènes chronologiques que nous nous proposons d’examiner
brièvement. Si l’on se
tourne vers les spécificités chronologiques, la forme Europe est
pourtant signalée avec un fort diagnostic de spécificité (-11 sur la période
1959-1979). L’accroissement ne serait donc notable qu’à partir de 1980, ce qui,
compte tenu de l’amplitude du corpus ne peut être considéré comme tardif. Les
spécificités évolutives affinent ce diagnostic. La forme Europe
s’accroît considérablement en 1982, puis en 1983, en 1984 ainsi qu’en 1988, en
1991 et en 2001. C’est donc sous François Mitterrand puis J. Chirac que cette
forme subit les évolutions les plus importantes. Si nous recoupons cette
information avec les spécificités par partie, Europe est très
représentée chez F. Mitterrand (+7), notée comme banale chez J. Chirac, en
retrait chez de Gaulle et Pompidou (-2) et surtout totalement inemployée par
V.G.E chez qui l’on note un indice négatif de 7. L’Europe n’est
pas une notion qui s’accroît de façon continue sur l’ensemble de la période. Il
semblerait que l’explication se trouve ici plutôt du côté des choix personnels
des locuteurs. Les nombreux accroissements constatés chez F. Mitterrand
mériteraient un examen plus détaillé mais semblent en corrélation avec la
spécificité importante dans l’emploi de cette forme chez l’avant dernier
président. En revanche, l’emploi n’étant quantitativement pas caractéristique
chez J. Chirac, l’accroissement observé laisse envisager une modification plus
brutale du discours. La
représentation de l’évolution de cette forme chez Chirac nous apprend que
l’accroissement est pratiquement continu sur l’ensemble de son septennat.
L’analyse pourrait alors s’attacher à chercher les motivations de cette
évolution sensible, dont on peut d’ores et déjà avancer que pour les dernières
années, l’événementiel a une incidence sensible : arrivée de l’Euro évoquée
longuement lors du message de décembre 2001, l’événement que représente le
passage à l’an 2000, évoqué en décembre 1999 et les échéances qui y sont
associées.
Si l’évolution
d’Europe se produit sur une large période, l’évocation de la monnaie
unique est beaucoup ponctuelle. L’accroissement de la forme euro est
signalé sur la période 98-01 avec une spécificité positive de 11. Les
accroissements spécifiques permettent de dater plus précisément ce phénomène.
L’euro connaît une forte progression en 1998 (indice de 7) puis en 2001 (indice
10). Plus précisément cette forme n’est employée que lors de ces deux années.
Plutôt que d’une tendance générale, il s’agit donc ici d’un usage fortement lié
à l’événementiel. Les trois
premières formes signalées par les spécificités chronologiques concernent des
marques personnelles. Ce fait n’était pas nécessairement indiqué par le
coefficient de corrélation, malgré l’indice considérable de probabilité de la
première forme (+28). La seconde du pluriel est notamment employée sur la
période 69-98, c’est à dire pratiquement sur l’ensemble de la période
correspondant aux successeurs du général de Gaulle. Les spécificités évolutives
signalent un brusque changement dans l’évolution du pronom personnel en 1971, 1973,
1974, 1976, 1977 et 1980, l’indice le plus fort étant noté pour l’année 1974.
Un phénomène identique apparaît pour la première du singulier, plus fortement
employé sur les années 69-99, là encore avec un fort indice de spécificité.
(+21). Les spécificités
chronologiques permettent par ailleurs de déceler des fait beaucoup plus
ponctuels. C’est ainsi que les formes nier et personne sont
signalées comme particulièrement remarquables pour l’année 1972. Ceci est loin
d’être anecdotique. En effet, la présence inhabituelle du segment personne
ne peut nier révèle la construction anaphorique du message de Pompidou en
1972, qui en constitue l’organisation argumentative. Quelques
points recoupent la première liste établie. La sur représentation du syntagme chers
compatriotes est ici indiquée sur la période 83-2001. La forme solidarité
est considérée comme spécifique sur les années 95-2001. Le substantif développement,
est sous employé de 69 à 2001, ce qui signifie que l’emploi est caractéristique
de de Gaulle. La régression précédemment observée est donc confirmée, elle se
produit sur une période importante. La forme dialogue, également recensée, est
ici signalée par un indice positif de 5 sur les années 83-97. Notons que la
forme Algérie, qui n’apparaissait qu’en fin de liste, est ici signalée
parmi les rangs les plus importants, fortement sous employée de 1964 à 2001. Il
semblerait donc que le coefficient de corrélation retienne essentiellement les
formes dont l’évolution se produit sur une large période, atténuant les
brusques revirements, plus ponctuels. Enfin, parmi
les évolutions les plus caractéristiques les formes bonheur, souhaite, vœux
sont signalées par des indices importants d’accroissement sur les périodes
75-78, 73-79 et 74-78. Ainsi, les locuteurs qui multiplient les marques
énonciatives en direction des Français sont également ceux qui consacrent
réellement leurs messages à la présentation des vœux. De cette
rapide expérience nous retiendrons que les spécificités évolutives et
chronologiques semblent particulièrement adaptées lorsqu’il s’agit de cerner
des évolutions brutales de vocabulaire. Le calcul basé sur le coefficient de
corrélation, peut-être plus approprié pour l’analyse de corpus de grande
ampleur, dégage des tendances plus générales. Ces deux méthodes offrent deux
perspectives complémentaires, deux lectures différentes de la chronologie. Il resterait
beaucoup à dire sur les messages de vœux des présidents de la cinquième
République. Nous aurons tenté ici de souligner à l’aide de quelques traitements
lexicométriques les faits saillants de ce corpus, en tentant d’identifier les
phénomènes purement chronologiques de ceux résultant de registres personnels.
Dans un second mouvement nous avons essayé d’examiner en diachronie l’ensemble de
ces allocutions en cherchant à adopter plusieurs angles d’approche. Tableau 11 : Corrélation chronologique du corpus voeux Mots en progression Coeff. Fréqu. Mot + 0.998 7
fraternelle + 0.979 11
veux + 0.976 5
solidaire + 0.976 5 particulière + 0.976 5
message + 0.976 5
inventer + 0.973 15
croissance + 0.967 13
emplois + 0.965 18
dialogue + 0.961 20
chance + 0.958 18
rôle + 0.954 13
efforts + 0.953 62
compatriotes + 0.949 6
sujets + 0.949 6
épreuve + 0.947 22
heureuse + 0.945 13
femmes + 0.939 24
contre + 0.931 6
démocratique + 0.926 8
fiers + 0.926 6
vois + 0.926 6
quotidienne + 0.925 10
initiatives + 0.917 5
contrat + 0.912 30
vivre + 0.909 15
choix + 0.907 8
protection + 0.899 26
suis + 0.896 16
démocratie + 0.895 13
homme + 0.892 8
comprendre + 0.890 7
égalité + 0.886 55
chers + 0.885 10
malades + 0.885 6
planète + 0.885 6
exclusion + 0.885 6
européen + 0.880 114
cette + 0.875 16
courage + 0.875 4
tiens + 0.874 15
forte + 0.872 12
demain + 0.872 10
souvent + 0.872 9
réussir + 0.872 9
élan + 0.870 11
tolérance + 0.868 24
trop + 0.866 9
qualité + 0.864 5
venons + 0.864 5
exclus + 0.864 5
engagent + 0.863 9
respect + 0.856 7
reculer + 0.855 511
est + 0.852 32
histoire + 0.852 5
enthousiasme + 0.844 7 nombreux + 0.843 34
sécurité + 0.842 93
si + 0.834 26
emploi + 0.833 13
longue + 0.832 197
c' + 0.832 21
possible Mots en régression Coeff. Fréqu. Mot - 0.994 29
effort - 0.991 12
fond - 0.991 6
commerce - 0.982 12
particulier - 0.970 9
total - 0.969 10
maintenir - 0.965 9
produit - 0.955 6
solution - 0.951 19
indépendance - 0.943 13
quant - 0.936 11
avait - 0.935 9
effet - 0.935 9
destin - 0.933 12
niveau - 0.932 18
aider - 0.921 41
peuple - 0.919 12
ailleurs - 0.917 10
expansion - 0.916 69
soit - 0.913 12
cent - 0.911 6
renouveau - 0.910 5
secousses - 0.910 5
pourrait - 0.910 5
diverses - 0.910 5
arrive - 0.905 7
marché - 0.904 11
mille - 0.901 6
aient - 0.899 11
voici - 0.898 26
celui - 0.891 7
1968 - 0.890 11
coup - 0.885 10
peuvent - 0.885 10
nombre - 0.883 13
libre - 0.867 12
serait - 0.866 602
en - 0.849 14
coopération - 0.848 12
agit - 0.836 7
développer - 0.835 41
françaises - 0.834 35
tant - 0.833 21
mesure - 0.822 29
moins - 0.817 23
sous - 0.812 8
résultats - 0.812 8
entend - 0.811 12
intérieur - 0.811 12
certes - 0.811 6
souhaits - 0.810 11
agriculture - 0.810 7
univers - 0.810 6
affaire - 0.809 126
par - 0.808 313
qu' - 0.808 5
sujet - 0.808 5
relations - 0.808 5
ceci - 0.806 15
cas - 0.806 14
monnaie - 0.805 5
assurément Tableau 12:Spécificités chronologiques majeures du corpus Vœux. terme F fp sp Période 19 vous 326 291 +E28 | 69-98 | 18 je 344 301 +E21 | 69-99 | 90 votre 59 37
+E21 | 73-78 | 479 nier 10 9 +E15 | 72-
| 93 chers 55 52
+E15 | 83-01 | 190 bonheur 24 16
+E14 | 75-78 | 85 compatriotes 62 56
+E14 | 83-01 | 212 algérie 21 3
-E13 | 64-01 | 122 vos 39 26 +E12 | 73-80 | 219 personne 21 10
+E12 | 72- | 72 voeux 80 37
+E12 | 73-79 | 11 en 602
398 -E12 | 67-01 | 50 on 115 62 +E12 | 82-93 | 393 euro 12 12 +E11 | 98-01 | 60 europe 99 19
-E11 | 60-81 | 5 à
925 527 +E10
| 59-79 | 303 conscience 15
9 +E10 | 00-
| 143 solidarité
33 24 +E10
| 95-01 | 21 qu 313 35 -E10
| 92-00 | 38 français
142 63 +E09
| 69-80 | 117 françaises 41
39 +E09 | 60-82 | 16 une 356 232 -E09 | 59-94 | 58 mes 102 94
+E09 | 73-01 | 173 unité 28 15 +E09 | 75-79 | 100 peut 50 10 +E08 | 72-
| 252 voudrais 19 13 +E08 | 71-76 | 83 souhaite 65
23 +E08 | 74-78 | 196 développement 23
3 -E08 | 69-00 | 87 doit 61 27 +E08 | 97-01 | 31 année 205 54
+E08 | 69-75 | 78 soit 69 16 +E08 | 68-69 | 194 trop 24 23 +E08 | 82-55 | 419 amis 11 10 +E07 | 71-34 | 66 j 88 74 +E07 | 69-52 | 175 droit 27 19 +E07 | 81-92 | Tableau 13: Accroissements spécifiques du corpus Voeux terme F Fx f spec.
partie code 19 vous 326 86 30 /E12
16 1974 219 personne
21 11 10
/E11 14 1972 90 votre 59
11 9 /E11
15 1973 479 nier
10 9 9
/E11 14 1972 303 conscience 15
15 9 /E10
42 2000 393 euro 12 12 8 /E10
43 2001 19 vous 326 45 16 /E09
14 1972 190 bonheur 24 18 9 /E09 19
1977 19 vous 326
114 18 /E08
18 1976 122 vos 39 17 8 /E08
19 1977 27 plus 269 65 12 /E07
12 1970 100 peut 50
24 10 /E07
14 1972 18 je 344 89 23 /E07
16 1974 393 euro 12 4 4 /E07
40 1998 31 année 205 94
22 /E06 16
1974 90 votre 59 36 9 /E06
19 1977 313 libertés
15 6 5
/E06 22 1980 33 c 199 184 18 /E06
40 1998 222 siècle
21 19 7
/E06 41 1999 329 cohésion 14 14 6 /E06
43 2001 17 dans 351 62 19 /E05
7 1965 78 soit 69 31 13 /E05
10 1968 19 vous 326 56 11 /E05
15 1973 11 en 602 296 8 \E05
16 1974 121 liberté 39 13 7 /E05
16 1974 208 pense 22 6 5 /E05
16 1974 252 voudrais 19 11 6 /E05
16 1974 56 ceux 104 45 9 /E05
18 1976 19 vous 326 130 16 /E05
19 1977 19 vous 326 170 22 /E05
22 1980 50 on 115 63 9 /E05
27 1985 90 votre 59 19 8 /E05
16 1974 284 démocratie 16
4 3 /E05
28 1986 60 europe 99 47 9 /E05
30 1988 143 solidarité 33
33 7 /E05 43 2001 173 unité 28 12 5 /E05
20 1978 [1] Le retentissement médiatique de la formule "année
utile" lancée par Jacques Chirac lors de ses voeux aux Français de
décembre 2000, par laquelle il engageait le gouvernement Jospin à entreprendre
de "vraies réformes", le taxant à mots à peine couverts
d'immobilisme, le message de Lionel Jospin, publié au Journal du Dimanche en
décembre 2000, quelques jours avant l'intervention du chef de l’État, grillant
la politesse à ce dernier et faisant entorse à la tradition de la cinquième
République qui veut que seul le président
adresse ses voeux aux Français, illustrent un double aspect des messages
de vœux de ces dernières années, éminemment politique, voire polémique et
profondément ancré dans le rituel. [2] Nous avons écarté le premier message du général De
Gaulle de décembre 1958, celui-ci n'étant pas à cette date officiellement
investi. [3] Sur ce point, voir la définition des séries textuelles
chronologiques d’André Salem, (1997) Statistique textuelle,
“ séries textuelles chronologiques ” p217-226, Paris, Dunod. [4] Nous avons essentiellement utilisé Lexico3 pour la
plupart des traitements lexicométriques présentés ici, spécificités par partie,
accroissements spécifiques et spécificités chronologiques, analyses
factorielles des correspondances, graphes de fréquences relatives. Nous avons
par ailleurs utilisé la fonction liste du logiciel Hyperbase pour
réaliser une analyse factorielle des pronoms personnels et adjectifs possessifs
ainsi que la fonction évolution pour le calcul du coefficient de
corrélation. Dans le cadre de cette même étude nous utilisons par ailleurs
Weblex, en particulier pour les calculs de cooccurrences et lexicogrammes, dont
nous ne présentons pas les résultats ici. -Lexico3 :
Cédric Lamalle, William Martinez, Serge Fleury, André Salem, ILPGA, Université
Paris 3 Sorbonne Nouvelle. -Hyperbase :
Etienne Brunet, UMR “ Bases, corpus et langages ”, Institut de
linguistique Française, CNRS Nice. -Weblex :
Serge Heiden, CNRS/ENS Lettres et Sciences Humaines, Lyon, UMR 8503,
“ Analyses de corpus linguistiques, usages et traitements ”. [5] On rappelle en effet que : - François Mitterrand, seul président à la
tête de l’État durant deux septennats, détient à ce jour un “ record de
longévité ”. -
Le général De Gaulle a démissionné de son second mandat après le rejet des
Français par voie référendaire du projet de régionalisation et de réforme du
Sénat le 27 avril 1969. Il aura exercé sa fonction dix années. -
Le mandat de George Pompidou s’interrompit brutalement le 2 avril 1974, avant
la fin de la cinquième année de sa présidence. [6] Plusieurs travaux ont porté sur des analyses comparées
des discours de De Gaulle et de Mitterrand. Dominique Labbé a notamment étudié
dans une démarche lexicométrique les emplois de France dans le discours des
deux présidents en examinant plus particulièrement les cooccurrences de cette
forme chez chacun d’eux, à partir d’un corpus lemmatisé. Quantitativement, il
en ressort que la proportion des associations qui différencient les deux hommes
est moindre que celle qui les unit. Les différences néanmoins ne sont pas
négligeables. Les emplois pronominaux notamment sont fortement discriminants.
On notera en particulier un sur emploi de l’association vous et France
chez de Gaulle alors que Mitterrand associe cette forme à nous, de
Gaulle employant la première du pluriel essentiellement lorsqu’il s’agit de
politique économique et sociale. Parmi les coprésences verbales, on retiendra
le déséquilibre des formes vouloir et pouvoir, les associations
étant négatives chez Mitterrand, positives chez de Gaulle. Ainsi, chez lui, la
France peut et veut alors que Mitterrand se veut plus nuancé au
travers de périphrases telles que chercher à, désirer, contribuer. Parmi
les noms, de Gaulle privilégie le destin et l’avenir là où
Mitterrand évoque l’Histoire. Enfin, notons brièvement une différence
primordiale entre les deux hommes, l’abondance chez Mitterrand d’un lexique
relatif à la défense et à la thématique militaire, principalement associé à la
première personne du pluriel. Notre force de dissuasion, notre armée,
nos soldats… Notons
par ailleurs la thèse de Françoise Finiss Boursin qui, précisément porte sur
les discours de vœux des présidents de la République sur la période 1958-1988.
Le volet thématique de cette étude met en évidence de nombreuses analogies dans
les allocutions de Mitterrand et De Gaulle mais aussi de Pompidou et Valéry
Giscard d’Estaing. Le
thème des vœux est par exemple peu présent chez De Gaulle et Mitterrand à
l’inverse de Pompidou et Giscard. De la même façon la politique extérieure
tient une place importante chez De Gaulle et Mitterrand alors qu’elle est très
en retrait chez les deux autres. Parmi les thèmes que Françoise Finniss Boursin
a répertoriés, celui des valeurs et sentiments confirme ces analogies. Cette
thématique est constituée des notions suivantes : espérance ou inquiétude
en l’avenir, mort, bonheur, fraternité, liberté, solidarité, gaullisme,
libéralisme, socialisme, sagesse et lucidité, modernité. Bien que les valeurs
soient représentées par l’ensemble des locuteurs, les sentiments sont
pratiquement absents chez De Gaulle et Mitterrand, Pompidou et Giscard leur
accordant en revanche une place importante. [7] Mémoire de D.E.A en sciences du langage, sous la
direction de Pierre FIALA, université de Paris 3 Sorbonne Nouvelle. [8] Sous la Quatrième République les vœux sont plutôt
présentés par le président du Conseil. Ce n’est cependant pas systématique. Le
président de la République ne s’exprime que très rarement en cette
circonstance. Il semblerait que seul Vincent Auriol ait présenté ses vœux, à
trois reprises, en décembre 1946, 1948 et 1953. [9] SALEM A. (1997) Statistique textuelle,
“ séries textuelles chronologiques ” p217-226, Paris, Dunod. SALEM
A. (1988), Approches du temps lexical - Statistique textuelle et séries
chronologiques, Mots n°17, ENS Editions. |